2020/Vol.3-N°5 : Système alimentaire urbain et santé en Afrique

3 |Risques sanitaires liés au recours à la restauration hors domicile : perceptions et pratiques des acteurs sociaux à Cotonou

Health risks related to the use of out-of home catering: perceptions and practices of social actors in Cotonou

Auteurs

  • AHOLOU Marcelle Gisèle Monwou Doctorante ahomar2000@yahoo.fr, École Doctorale Pluridisciplinaire Laboratoire d'Analyse des Dynamiques Sociales et des Études du Développement (LADYD)
  • MONGBO Roch Lambert Professeur titulaire d’Agronomie et de Socio-anthropologie rochl_mongbo@yahoo.fr , et des Études du Développement (LADYD) Université d'Abomey-Calavi (UAC), Bénin

Mots-clés:

Cotonou| perceptions| pratiques alimentaires| risque sanitaire| gargotes|

Résumé

L’explosion démographique, la forte urbanisation, le développement de l’industrie alimentaire, la montée du travail féminin et les contraintes de la vie professionnelle ont engendré des répercussions sur les pratiques alimentaires chez les populations urbaines en Afrique. Dans la commune de Cotonou, le recours à la restauration hors domicile est progressivement passé de l’état d’habitude à un comportement culturel, qui n’est pas sans incidence sur la santé des populations. Le présent article a pour objectif d’appréhender les pratiques et les perceptions relatives aux risques sanitaires liés à la restauration hors domicile chez les acteurs sociaux à Cotonou. Il est basé sur une démarche empirique et s’inscrit dans le cadre de notre recherche en thèse en socio-anthropologie de l’alimentation. Les données ont été collectées au moyen de trois outils : la grille d’observation, le questionnaire et le guide d’entretien. La taille de l’échantillon s’élève à 396 ménages, 47 consommateurs et dix vendeuses (eurs) dans les gargotes, et 13 acteurs institutionnels. Les résultats indiquent qu’au moins 76,42 % de ménages ont recours à la restauration hors domicile. Face à la certitude du risque sanitaire potentiel encouru par les consommateurs, et dont ils en font souvent l’expérience, la responsabilisation des différents acteurs (producteurs, vendeurs et consommateurs) par les pouvoirs publics est nécessaire et s’impose comme le remède le plus certain pour protéger les populations.

Introduction

Les populations urbaines africaines sont sujettes à de profondes transformations ces dernières décennies. Plusieurs facteurs expliquent cet état de choses : l’urbanisation sans cesse croissante, la modification de la structure familiale, la montée du travail féminin. Tout ceci a conduit au développement des industries agro-alimentaires, à la croissance de la restauration hors domicile. Cette situation n’est pas sans répercussions sur la santé alimentaire et nutritionnelle des populations. D’après C. Fischler (2001, p. 199), la médecine affirme de plus en plus vigoureusement le souci que lui causent les « maladies de civilisation » liées à l’alimentation, -depuis- les années soixante-dix et surtout quatre-vingt. Etant donné que prévenir vaut mieux que guérir en matière de santé, une maîtrise de la situation devient indispensable.
En effet, malgré l’apparence qu’elle présente, la ville de Cotonou n’échappe pas à cette situation. Capitale économique et administrative du Bénin, elle devient le plus grand pôle d’attraction des populations. Par ailleurs, tout en étant la plus grande, elle possède une organisation spatiale que les autres villes du pays semblent imiter, et qui impose à une grande partie de ses habitants, des voyages quotidiens ou hebdomadaires entre leur lieu de résidence et leur lieu de travail. Dans un tel contexte, les populations adoptent des régimes alimentaires associant aux repas domestiques, une alimentation hors domicile issue de gargotes ou de restaurants, de natures et qualités diverses, développant ainsi des pratiques alimentaires hybrides, complexes et dynamiques. La consommation d’un repas à l’extérieur de la maison devient un phénomène urbain, avec 20 % des repas pris hors domicile pour Cotonou, 18 % pour les autres zones urbaines et seulement 14 % pour les zones rurales (PAM, 2014, p. 32). Ainsi, la situation alimentaire à Cotonou demeure un souci constant et un défi pour les gouvernants. Le fort taux de recours à la restauration hors domicile n’est pas sans répercussions sur la santé des populations. Un parcours de quelques travaux antérieurs sur le sujet renvoie à deux recherches. La première est un article en biochimie de Moussa et al. (2006) et portant sur les possibilités de contamination des aliments de rues à Cotonou. Les auteurs ont procédé à des analyses au laboratoire, d’échantillons de mets prélevés chez les vendeurs de rues, immédiatement après la cuisson, lorsqu’ils ont des ustensiles bien rangés et plus ou moins propres. Les résultats auxquels a abouti cette recherche, après les investigations sur les lieux de vente, ont révélé la présence d’un risque perpétuel de contamination des mets selon les types de distributeurs (L. Baba-Moussa et al., 2006, p. 2). Aussi, la totalité des plats incriminés ont-ils des charges microbiennes en flore aérobie mésophile, indicateurs de pollution fécale, de staphylocoques et quelques levures et moisissures. A l’instar de cette première recherche, la deuxième fait objet d’une analyse au laboratoire, d’échantillons de mets prélevés chez les vendeurs de rues. Il relève de L. S.M.I.Hoteyi et al. (2014) et est titré : « Alimentation de rue des populations : une santé en péril à Cotonou au Sud-Bénin ? ». Les résultats ont notifié une contamination des aliments, notamment les poissons, les viandes et les produits maraîchers (L. S. M. I. Hoteyi et al., 2014, p. 33).
Dans le contexte présenté par les résultats issus de ces travaux, la présente contribution a pour objectif principal d’appréhender les risques sanitaires liés à la restauration hors domicile chez les acteurs sociaux à Cotonou, face aux pratiques et perceptions relatives au phénomène. Elle se situe dans une perspective socio-anthropologique. Basée sur une démarche empirique, elle s’inscrit dans le cadre de notre recherche en thèse. Dans le triangle culinaire développé par C. Lévi-Strauss (1965, p. 19) et repris par T. Fournier[1] (2009, diapositive 18), les pratiques alimentaires renvoient à la rencontre de trois réalités ou situations que sont l’acteur social (le mangeur ou les mangeurs) que l’on peut décrire par diverses catégories classiques en sociologie (âge, sexe, catégorie socioprofessionnelle, niveau d’étude) ; la situation ou le contexte social identifié (type de partage : festif ou ordinaire, à domicile ou hors domicile, public ou privé, etc.) ; et l’aliment particulier sur lequel s’agrègent des représentations à l’intérieur d’un univers socioculturel donné. Sous ce registre, le présent article s’appuie sur une démarche descriptive et compréhensive des pratiques alimentaires et des perceptions liées à la restauration hors domicile chez les acteurs sociaux, de même que les risques sanitaires qui en découlent. Trois modèles théoriques sont mis à contribution dans le cadre conceptuel de la recherche. Le premier est celui de l’imaginaire symbolique développé par C. Fischler (2001, p. 27-34). Il rend compte des représentations liées à l’alimentation chez tout groupe social, avec une pensée classificatoire partant du comestible au non comestible dans toutes les cultures humaines. Le second, développé par J.-P. Poulain in A. Basdevant et al. (2001, p. 98), expose les trois ambivalences de l’alimentation : plaisir-déplaisir, santé-maladie, vie-mort. Quant au troisième modèle, il rend compte de trois logiques à la base de l’expérience alimentaire du mangeur moderne. Il s’agit de l’approche trilogique de la socialisation- externalisation - subjectivation, et relève de M. de Labarre (2001, p. 4).
[1] T. Fournier exposant l’approche interactionniste de l’alimentation développée par Jean-Pierre Corbeau et qu’il présente dans le document intitulé Fournier Tristan, Approche socio-anthropologique de l’alimentation, Sous la direction scientifique de JP Poulain, CERTOP TAS, Université de Toulou 2, Mercredi 11 février 2009, 31 diapositives.

Méthodologie

1. Méthodologie

1.1. Présentation de la zone d’étude

La présente recherche a été effectuée dans la Commune de Cotonou, la seule du département du Littoral, en République du Bénin. Elle est située sur le cordon littoral qui s’étend entre le lac Nokoué et l’Océan Atlantique. Elle est limitée au nord par la commune de Sô-Ava et le lac Nokoué, au sud par l’Océan Atlantique, à l’est par la commune de Sèmè-Kpodji et à l’ouest par celle d’Abomey-Calavi. Couvrant une superficie de 79 km2, dont 70 % se trouvent situés à l’ouest du chenal de Cotonou, la commune comprend, depuis l’avènement de la décentralisation, treize (13) arrondissements subdivisés en 144 quartiers différemment configurés. La commune et ses arrondissements sont illustrés par la carte n°1.
Les quartiers de l’est sont reliés à la partie ouest par trois ponts. A l’ouest de Cotonou, se trouvent le Port autonome et l’aéroport international qui font de la ville, la plus importante porte d’entrée et de sortie du Bénin, tandis que l’est dispose d’une vaste zone industrielle. Capitale économique du Bénin, Cotonou abrite les deux tiers des industries du pays. Estimée à 320 348 habitants en 1979 selon le premier Recensement général de la population et de l’habitation (RGPH1), sa population est passée à 536 827 habitants en 1992, soit un taux de croissance intercensitaire de 4,05 %. En 2002 et selon le RGPH3, la population de Cotonou a été évaluée à 665 100 habitants, accusant ainsi un taux de croissance de 2,07 %. Au recensement de 2013, sa population est de 760 000 habitants.

1.2. Echantillonnage et taille de l’échantillon

Les groupes cibles retenus sont inscrits dans une catégorisation à trois niveaux : les ménages, les consommateurs puis quelques vendeurs et vendeuses dans les gargotes, et enfin quelques acteurs institutionnels. Les ménages constituent les cibles principales. Les femmes de ménages ont été considérées comme les principales répondantes, vu le rôle qu’elles y jouent sous l’angle de l’alimentation (cuisine). Dans les cas où elles sont absentes, un autre membre du ménage ayant les informations nécessaires est interviewé. Les consommateurs rencontrés dans les gargotes constituent les cibles secondaires. Quelques vendeuses et vendeurs dans les gargotes ont aussi été interviewés dans cette deuxième catégorie. En ce qui concerne les acteurs institutionnels, ils représentent la troisième catégorie de cibles. Ils sont composés de responsables ou membres d’institutions œuvrant dans le domaine alimentaire, nutritionnel ou sanitaire. C’est le cas des centres de santé publiques ou privés qui offrent des services nutritionnels aux populations dans la commune de Cotonou, de certaines organisations non gouvernementales (ONGs), de structures nationales ou internationales intervenant dans le domaine.
1.2.1. Ménages 
L’échantillon constitué des ménages, est représentatif au niveau communal, et basé sur un échantillonnage par grappes stratifiées à deux degrés. Les 13 arrondissements que compte la commune de Cotonou ont été considérés comme des grappes. Au premier niveau ou degré, les différents quartiers ont été listés suivant les différents arrondissements de la ville. Deux quartiers par arrondissement sont échantillonnés par la technique de sélection des nombres aléatoires de distribution normale avec le tableur Excel. Au second degré, un total de 15 ménages au moins par quartier est tiré. Le point de départ a été repéré à partir du carrefour central du quartier. Cinq carrefours ont été choisis au hasard par quartier. Pour chaque carrefour, une rue qui lui est connectée a été sélectionnée par hasard. Ensuite, toutes les maisons sont assignées à des numéros. Enfin, trois maisons par rue ont été choisies. La taille finale de l’échantillon pour les ménages, s’élève à 396.
1.2.2. Gargotes
La pertinence de leur contribution se justifie par le souci de triangulation des données, en vue de mieux appréhender les pratiques et les perceptions des divers acteurs sociaux sur ces lieux les plus fréquentés. Le critère de sélection des gargotes de l’échantillon a été leur implantation dans les quartiers où a eu lieu la collecte des données auprès des ménages. Etant donné la sensibilité du sujet et la réticence des usagers de ces lieux à se prêter à nos entretiens, la technique d’échantillonnage accidentel a été utilisée. Le seuil de saturation a permis de fixer la taille de l’échantillon à 47 consommateurs et 10 vendeurs et vendeuses.  
1.2.3. Acteurs institutionnels
En dehors des ménages et des gargotes, quelques acteurs clés ont été interviewés. Il s’agit de ceux intervenant dans des structures ou des organisations qui œuvrent dans le domaine de la santé, de l’alimentation et de la nutrition au sein de la commune de Cotonou. La technique de choix raisonné a guidé la sélection de ce groupe cible qui comprend des professionnels de santé, des assistants sociaux, des nutritionnistes et d’autres acteurs d’institution. Ils représentent globalement un groupe stratégique, dans la mesure où ils renvoient au discours nutritionnel officiel. Le critère d’inclusion a été que l’acteur interviewé ait exercé au préalable dans le domaine sanitaire, de l’alimentation ou de la nutrition, et maîtrisé les questions y afférentes, notamment celles liées à la présente problématique. Au total, 13 acteurs institutionnels ont été interviewés, soient trois nutritionnistes, deux médecins, deux infirmiers, une sage -femme, quatre assistantes sociales et un consultant en nutrition.

1.3. Collecte et analyse des données

L’étude des pratiques alimentaires, des perceptions et du risque sanitaire lié à la restauration hors domicile, fait appel à une démarche qualitative et quantitative : les techniques retenues dans le cadre de cette recherche sont inspirées des approches méthodologiques utilisées par J.-P. Poulain (2002, p. 39-41) à propos de l’étude des pratiques alimentaires. L’auteur distingue quatre types de données. Les pratiques observées (comportements alimentaires réellement mis en œuvre par un mangeur ou un groupe de mangeurs donné), les pratiques objectivées (comportements réels mais observés de façon indirecte par les traces qu’ils laissent), les pratiques reconstruites (données obtenues en demandant à un acteur de se remémorer ses propres pratiques ; Ici la mise en œuvre peut se faire sur une échelle de temps : journée alimentaire, vingt-quatre dernières heures, trois jours, une semaine…) et les pratiques déclarées (correspondent à ce que les sujets prétendent faire ou avoir fait quand ils répondent de façon spontanée à un questionnement). Dans la présente recherche, les données collectées auprès des ménages et des consommateurs dans les gargotes, notamment en ce qui concerne leurs habitudes alimentaires, s’appuient sur des pratiques reconstruites et des pratiques observées : il s’agit des pratiques reconstruites dans la mesure où les répondants ont été amenés à se remémorer les pratiques alimentaires des ménages qu’ils représentent.
La collecte des données a connu deux phases : la pré-enquête et l’enquête proprement dite. La pré-enquête a duré quinze jours. Elle a permis l’administration des outils de collecte en vue de les tester, la connaissance de la durée approximative du déroulement d’un entretien. Quant à l’enquête proprement dite, elle a duré deux mois (du 15 février au 22 avril 2017) et a permis la collecte des données auprès de 466 personnes, toutes cibles confondues. Les périodes de collecte ne sont pas distinctes selon les différentes cibles. Elles ont été essentiellement guidées par la disponibilité des enquêtés et les dates de rendez-vous accordées, notamment au sujet des ménages et des acteurs institutionnels. Le tableau n°1 qui suit, présente les techniques et outils de collecte de données selon les groupes cibles.
A l’endroit des ménages (premier groupe cible), le questionnaire a été utilisé comme outil de collecte. Les interviews ont eu lieu en face à face. Pour le deuxième groupe cible qui comprend les consommateurs, les vendeuses et vendeurs dans les gargotes, les entretiens semi directifs individuels ont eu lieu avec un guide d’entretien ayant servi pour chaque catégorie (consommateurs et vendeurs). La technique d’entretien a servi également pour la collecte des données auprès des acteurs institutionnels (troisième groupe cible). Un guide d’entretien spécifique a été utilisé. Le questionnaire et les guides d’entretien ont porté sur les différents axes du sujet et suivant les catégories de cibles : pratiques de la restauration hors domicile, risques sanitaires, perceptions.
Les observations ont également été faites de façon directe et guidée par une grille. Les enregistrements des discussions sur supports magnétiques et la prise de photos ont également servi comme des techniques d’appui à la collecte. Le croisement de toutes ces données de différentes natures constitue un avantage. Il est nécessaire et permet de saisir le sens des pratiques, leurs implications et les perceptions des acteurs sociaux.  Par contre, l’une des limites de la recherche a été la non vérification de façon directe, de l’état nutritionnel ou sanitaire des usagers des gargotes, à travers un examen médical. Les analyses effectuées à ce sujet se sont basées sur le discours des enquêtés et les statistiques obtenues à l’Hôpital de zone de Mènontin à Cotonou.
La saisie des données collectées a été effectuée au moyen du logiciel Word 2007. Le logiciel et SPSS 17.00 et le tableur Excel 2010 ont été utilisés pour les analyses statistiques, notamment pour le croisement de certaines données avec des variables (âge, sexe, occupation professionnelle, etc.).

Résultats

2. Résultats

2.1. Ampleur du recours à la restauration hors domicile dans la commune de Cotonou

L’analyse des données collectées auprès des ménages a permis de noter l’ampleur du recours à la restauration hors domicile à Cotonou.
2.1.1. Proportions de ménages concernés
Le tableau n°2 qui suit, présente en pourcentage, la répartition par sexe et par tranche d’âge du nombre de répondants ayant déclaré ou non qu’au moins un membre de leur ménage s’alimente à l’extérieur de la maison.
L’analyse des données du tableau n°2 montre que 76,42 % des répondants (au nom des ménages) de sexe masculin et 81,38 % de ceux de sexe féminin ont affirmé qu’au moins un membre de leur ménage s’alimente hors domicile. Il est également noté que ceux qui s’alimentent souvent hors du ménage sont plus nombreux dans les tranches d’âge de 25 à 34 ans et de 35 à 44 ans. Ce constat a été fait au niveau des deux sexes. Pour preuve, la proportion cumulée entre 25 et 44 ans fait à elle seule, un total de 57,55 % chez les répondants de sexe masculin et 55,52 % chez ceux de sexe féminin.
2.1.2. Répartition selon les occupations professionnelles et les ethnies
Les résultats obtenus au sujet des occupations professionnelles indiquent que la plupart des répondants de sexe masculin ayant déclaré qu’eux-mêmes ou au moins un membre de leur ménage s’alimente hors domicile, appartient à la catégorie des artisans (27,36 %), des fonctionnaires et des travailleurs du privé (16,04 %). Par contre, au niveau des répondants de sexe féminin, la plupart exercent comme activités principales, la transformation (28,96 %), le commerce (18,62 %) et l’artisanat (17,24 %). En somme, les catégories ‘artisanat et petit services’, ‘fonctionnaires et travailleurs du privé ‘, ‘transformation et commerce’ sont les plus touchées par le phénomène de la restauration hors domicile. A propos des ethnies de provenance, une répartition suivant le sexe et les ethnies a été faite. Il en ressort que toutes les ethnies sont concernées par le phénomène. Toutefois, les ménages où au moins un membre s’alimente à l’extérieur proviennent en majorité de l’ethnie « Fon et apparentés ». En effet, 39,62 % des répondants de sexe masculin et 41,38 % de ceux de sexe féminin, ayant déclaré qu’eux-mêmes ou au moins un membre de leur ménage a recours à l’alimentation hors domicile proviennent de l’ethnie Fon et apparentés

2.2. Pratiques liées à la restauration hors domicile dans la commune de Cotonou

2.2.1. Les différents lieux de restauration hors domicile
Divers lieux s’offrent aux acteurs sociaux dans leur recours à la restauration hors domicile. Il est donc important d’en faire une répartition afin de mieux cerner ceux les plus fréquentés et les pratiques y afférentes. L’analyse des données collectées révèle une disparité des proportions de fréquentation selon les différents lieux de prise de repas hors domicile. De façon générale, les lieux les plus fréquentés sont les gargotes, et ce, aussi bien par les hommes (49,05 %) que par les femmes (64,82 %). Un classement selon l’importance des proportions, se présente comme suit, quel que soit le sexe des répondants au nom des ménages : gargotes- maquis- restaurant- cafétéria- marché. Les maquis (reconnus par 15,09 % de répondants masculins et 8,29 % de répondants féminins) et restaurants (reconnus par 6,61 % de répondants masculins et 6,89 % de répondants féminins) se retrouvent respectivement en deuxième et troisième position, mais sont peu fréquentés comparativement aux gargotes. Les marchés sont moins fréquentés pour la cause, comparativement aux autres lieux.
2.2.2. Fréquences journalières de prise de repas hors domicile par les membres des ménages concernés
Les données recueillies révèlent que les personnes qui s’alimentent hors de leur ménage, ne dépassent pas souvent une prise de repas par jour. Elles confirment également que ceux qui mangent souvent à l’extérieur appartiennent à la tranche d’âge allant de 25 à 44 ans. Leur proportion fait 75,47 % chez les répondants de sexe masculin et 68,96 % chez ceux de sexe féminin. En effet, ils s’alimentent hors du ménage souvent une fois par jour. Parmi eux, quelques rares personnes s’alimentent deux, trois ou quatre fois par jour hors domicile. Cette observation est faite aussi bien au niveau des répondants de sexe masculin qu’au niveau de ceux de sexe féminin.
Suivant le sexe et les activités principales des répondants, il est noté qu’au moins un membre du ménage des répondants de sexe masculin appartenant à la catégorie des artisans, des fonctionnaires et travailleurs du privé, s’alimente souvent une fois par jour à l’extérieur de la maison. Il en est de même pour les répondants de sexe féminin, qui exercent comme activité principale la transformation, l’artisanat et le commerce. Aussi la fréquence qui domine est d’un repas en dehors du ménage par jour (34,91 % chez les répondants de sexe masculin et 61,72 % chez ceux de sexe féminin). Il est néanmoins perçu une fréquence de deux repas hors du ménage par jour chez 14,13 % de personnes chez les répondants de sexe masculin et 10 % chez ceux de sexe féminin. Pour le cas de trois repas hors du ménage par jour, les fréquences sont de 5,66 % et 2,74 % respectivement chez les répondants de sexe masculin et de sexe féminin. 
En somme, l’alimentation hors domicile est vraiment un phénomène qui se vit par les acteurs sociaux à Cotonou. Le phénomène n’exclut aucune catégorie sociale. Hommes et femmes sont autant concernés, de même que toutes les ethnies, toutes les catégories socioprofessionnelles et tous les niveaux d’instruction, même si les degrés de fréquentation varient d’une catégorie sociale à une autre.
2.2.3. Motifs de recours à la restauration hors domicile selon les ménages
L’analyse des données relatives aux motifs de recours à cette pratique montre que la raison principale est le travail (59,34 %). D’autres motifs relativement moins importants comme la recherche du plaisir (10,86 %), la fatigue liée à une dure journée de travail (8,08 %), ont également été évoqués par les répondants. Les raisons liées à la vie professionnelle renvoient à des contraintes, des réalités face auxquelles les acteurs sociaux ne sont pas toujours libres. La vie professionnelle structure donc aussi les habitudes alimentaires, notamment dans un milieu urbain comme Cotonou. Ceux ne fréquentant aucun lieu de restauration hors domicile ont évoqué comme principale raison de leur option, le risque de tomber malade (36 sur 79, soit 45,57 % de ceux ne fréquentant aucun lieu de restauration hors domicile). Ceci revient à reconnaître que certains sont bien conscients du risque encouru par la fréquentation de ces lieux.
2.2.4. Les gargotes : lieux de restauration hors domicile les plus fréquentés
Les résultats ont montré que parmi les différents lieux de restauration hors domicile à Cotonou, les gargotes sont les plus fréquentés. Pour en revenir aux gargotes, expression souvent accompagnée d’une connotation péjorative, le mot gargote (de gargoter : manger malproprement) désigne un restaurant à bon marché, où la cuisine et le service manquent de soin. A Cotonou, elles sont souvent installées dans les rues, les coins de rue, les abords des principales voies. C’est ce qu’illustre la photo n°1 ci-après :
Cette photo a été prise dans la zone du Port autonome de Cotonou, particulièrement dans celle de la Société béninoise de manutention portuaire (SOBEMAP), sis au quartier Guincome (5ème arrondissement). Les gargotes ainsi illustrées se présentent à l’extérieur comme des cabanes, des appâtâmes plus ou moins mal entretenus, où s’alimentent à bon marché, différentes catégories de personnes. Cet espace illustré par la photo n°1 abrite plusieurs gargotes. Les forces d’attraction et les dynamiques autour de ces lieux sont souvent remarquables. Les usagers, en de petits groupes ou seuls, s’y réfèrent, où ils s’alimentent à des prix relativement abordables. Les prises de repas se font aussi bien dans la convivialité que la solitude. Ce qui importe pour ces acteurs sociaux est d’abord de répondre au besoin physiologique que constitue la faim. Dans la présente recherche, les gargotes observées sont plus concentrées dans les zones résidentielles et commerciales. Par contre, il est noté beaucoup plus de restaurants, hôtels et maquis dans la zone de service. Selon C. K. Agli et al. (2004, p. 4), ces sites d’alimentation à Cotonou sont plus remarquables dans trois types de zone, à savoir la zone de résidence (1er, 2e, 3e, 4e, 6e, 8e, 9e, 10e et 13e arrondissements), la zone commerciale (5e et 7e arrondissements) et la zone de services (11e et 12e arrondissements).
Dans les gargotes, des inconnus se retrouvent à la même table. Pourrait-on parler de convivialité ou d’individualisme ? Il peut arriver que des amis s’y croisent ou qu’ils y aillent ensemble. Il arrive aussi que des consommateurs achètent et emportent les aliments à la maison ou au service, avec leurs propres assiettes ou avec des emballages jetables (‘take away’). Dans ces lieux, il arrive souvent que des usagers de différentes catégories sociales se retrouvent autour d’une même table. Bien qu’il y ait une proximité physique, chacun est dans son assiette. Bien des fois, des conversations sur des faits d’actualité, ou ayant l’air d’un passe-temps peuvent naître. Ou bien encore, ce sont des conflits qui se provoquent des fois entre consommateurs. Les types de mets, varient suivant les gargotes. Des aires d’ignames pilées, de dèguè, de riz, de bouillie, de ‘atassi’, et d’autres mets sont observés à Cotonou. Les coûts varient d’une gargote à une autre (selon les zones d’implantation), d’un vendeur à un autre. Bref, il existe des prix pour toutes les bourses. Les règles d’hygiène ne sont pas respectées par tous les tenanciers des gargotes. Il est aussi noté que les consommateurs ne font pas tous attention à tout cela. Les hommes sont plus nombreux que les femmes à fréquenter ces lieux. Aussi, les motifs de fréquentation des gargotes ne sont pas différents de ceux liés au recours à la restauration hors domicile en général.
De l’analyse des données collectées auprès des usagers des gargotes, il est noté que 74,47 % de ce groupe cible ont recours à ces lieux pour des raisons de contraintes professionnelles. En effet, dans la commune de Cotonou, l'éloignement des zones d'habitat par rapport aux lieux du travail constitue l’une des causes déterminantes de la restauration hors domicile et par ricochet, l’une des raisons qui renforcent ce secteur d’activité. Selon les acteurs sociaux interviewés (grande majorité des usagers), la contrainte liée au temps au travail constitue un élément déterminant dans les prises des repas, de même que les lieux choisis pour se restaurer. Pour d’autres, le temps passé au travail est relativement très considérable et pesant : « Comme je suis conducteur de taxi- moto, je ne pourrai pas rentrer à la maison, manger avant de revenir à mon activité, je vais perdre du carburant et du temps[2] ».
Par contre, le phénomène n’est pas spécifique à la commune de Cotonou (même s’il y est plus remarquable que dans les autres milieux urbains du pays). Il est également observé dans de nombreux pays africains. L’exemple de la ville de Bamako au Mali a été présenté par M. Ag. Bendech et al (2000, p. 45), où les deux formes de prises alimentaires à et hors domicile ont été signalées chez la plupart des ménages interviewés. Aussi, E.C. Mitchikpè et al. (2003, p. 37), dans une étude, ont montré que plus de 70 % des ménages étaient concernés par la consommation hors domicile dans toutes les villes du Bénin. Les deux principales raisons soulignées par ces auteurs demeurent les exigences du service et l’éloignement des lieux de travail. Y. Berton Ofoueme (2007, p. 323), dans un article de la revue du CAMES[3], a aussi montré que la restauration populaire, dans la conurbation Cotonou/Porto-Novo/Abomey-Calavi (trois villes du Bénin), comme dans la plupart des villes africaines, est marquée par un important dynamisme attribué à la conjugaison de divers facteurs d’ordre géographique, socio-économique et culturel : le même phénomène en France a pareillement été un objet de publication pour F. Régnier et al. (2006, p. 41), qui ont montré que le recours à la restauration hors foyer constitue un phénomène très urbain et essentiellement parisien, avec comme principales raisons, les contraintes du travail ou des études. Toutefois, il est à préciser que les différents aspects de sa manifestation varient d’un milieu à un autre, d’un pays à un autre. Mis à part le travail, d’autres motifs ont été signalés par les usagers interviewés, bien qu’à de faibles proportions. Il s’agit par exemple du coût des produits vivriers et du manque de moyens financiers pour s’en approvisionner (8,51 %), de la bonne qualité des repas vendus dans les gargotes (6,38 %), du plaisir que peut procurer une alimentation hors domicile (4,26 %), de la situation des hommes célibataires face aux besoins de s’alimenter (6,38 %).
2.2.5. Types de mets vendus dans les gargotes selon les produits de base utilisés
De façon synthétique, les différents mets qu’offrent les gargotes peuvent être également classés suivant les produits alimentaires de base ayant servi à leur préparation. Les mets les plus fréquents sont ceux à base de riz, cités par tous les consommateurs interviewés (100 %), de maïs (80,85 %), d’igname (53,19%), de blé (21, 28 %), de manioc (14,89 %) et de haricot (8,51 %). Les coûts des plats sont variables : le prix moyen pour s’alimenter dans les différentes gargotes est de 400 francs CFA. Il varie en fonction des types de gargotes et selon leurs standings, mais également selon la nature des mets vendus. Au minimum, les acteurs sociaux peuvent s’alimenter avec 100 francs CFA, dans les gargotes qui se situent dans les arrondissements des zones périphériques de la ville de Cotonou. Selon les usagers interviewés, si le standing de la gargote est moyennement haut, alors il faut disposer d’au moins mille francs 1000 francs CFA au maximum pour un plat.
Les comportements des acteurs sociaux en lien avec la restauration hors domicile révèlent qu’elle constitue un phénomène social, face auquel aucune catégorie sociale ne saurait être indifférente.
Dans le même temps, elle constitue un terrain que les autorités publiques pourraient exploiter en vue de garantir une sécurité alimentaire dans toutes ses composantes, aux populations.

2.3. Risques sanitaires liés au recours à la restauration hors domicile et perceptions des acteurs sociaux

Les gargotes étant les lieux de restauration hors domicile les plus fréquentés, les perceptions des acteurs sociaux ont porté particulièrement sur la qualité des mets qui y sont vendus, l’assainissement de ces lieux et les matériels utilisés (couverts, etc.).
2.3.1. La qualité des mets vendus dans les gargotes
Comparativement aux repas pris à domicile, les appréciations des usagers interviewés (2ème groupe cible) par rapport aux mets pris dans les gargotes ont été classées en trois catégories. En effet, pour 59,57 % des usagers interviewés, les mets qu’ils consomment à domicile sont relativement mieux, car ils ont plus ou moins la liberté de décider de ce qu’ils vont manger. Aussi, ont-ils le contrôle sur la qualité des ingrédients à utiliser, les lieux d’approvisionnement des matières premières. Le contrôle de la propreté des ustensiles et de toute la cuisine, du couvert et des aliments est de mise ou peut être effectif. Il est fréquent selon les consommateurs, de souffrir de troubles d’origine alimentaire (maux de ventre, diarrhée, etc.) à la suite d’une prise de repas dans les gargotes. Aussi, certaines vendeuses (désignées sous l’expression populaire de ‘bonnes dames’ par les interviewés) manquent-elles d’hygiène, même sur les lieux de vente. Il y en a qui utilisent pour ingrédients, des produits alimentaires de mauvaise qualité, telles que des tomates, des carottes, des pommes de terre ou papayes pourries. D’autres font moudre les ingrédients dans « des moulins mal entretenus, installés à des endroits très insalubres ». Au-delà de ces comportements, d’aucuns font un surdosage de bouillons (cubes) dans les mets. Ces situations amènent les usagers (notamment 59,57 % de ceux interviewés) à percevoir les repas hors domicile comme des nourritures de mauvaise qualité ne pouvant égaler ceux pris à domicile du point de vue de la qualité nutritionnelle et des soins qui accompagnent leur préparation.
Par contre, une partie de la cible interviewée ne se préoccupe pas assez de la qualité des mets (14,89 %). Selon ces derniers, « on ne regarde pas les risques alimentaires pour s’alimenter au dehors, c’est juste pour se satisfaire[4]». Ils ne s’en tiennent pour la plupart, qu’au plaisir que cela leur procure. 
Néanmoins, il existe des gargotes qui assurent l’assainissement des lieux et l’hygiène autour des repas. Les aliments qui y sont vendus sont plus ou moins convenables, voire même plus acceptables que ceux de la maison. C’est ce qu’ont affirmé 38,30 % des interviewés. Ces derniers ont donné de bonnes appréciations sur les gargotes, de même que sur la qualité nutritionnelle des aliments qui s’y vendent. Selon eux, il existe des gargotes où les lieux sont bien assainis et où les vendeuses ont recours à des meules ou des moulinex pour écraser les condiments, plutôt qu’aux moulins mal entretenus. Chez ceux-ci, le risque alimentaire encouru est relativement faible. Mais il faut les identifier afin de pouvoir s’y référer au besoin.
2.3.2. L’assainissement des gargotes
En ce qui concerne les perceptions des consommateurs quant à la salubrité des lieux où ils s’alimentent, les données recueillies auprès des usagers ont permis de classer en gargotes en trois catégories : celles qui sont bien assainies, peu assainies et pas du tout assainies. Pour la première catégorie (regroupant 23,40 % des consommateurs), ils affirment fréquenter des gargotes qui sont propres et où les vendeuses (vendeurs) prennent des mesures idoines pour garantir la sécurité sanitaire des aliments. Elles ont été appréciées ainsi à travers les mesures prises, et qui sont entre autres : les vendeuses (eurs) évitent le contact des nourritures avec les mouches en utilisant du pétrole ou de la fumée qui les repousse ; elles gardent propres les assiettes, les cuillères et les fourchettes, bref, tout le matériel utilisé ; les lieux sont bien balayés avant le démarrage des activités ou l’arrivée des mets ; elles évitent de jeter des eaux usées qui renvoient des odeurs à proximité des gargotes ; les tables sont bien gardées propres, de même que les matériels servant pour le couvert. Les cuillères et fourchettes sont plongées dans de l’eau bouillante avant et après chaque utilisation ; Les poissons ou viandes (frits ou fumés) sont mis en mini coffres. Quant à la seconde catégorie, elle est relative aux gargotes moins propres et dont les vendeuses (vendeurs) ne s’imposent pas assez de rigueur en ce qui concerne les règles d’hygiène. Elles ont été soulignées par 48,94 % des consommateurs interviewés. Selon ces derniers, les matériels de couvert ne sont pas régulièrement lavés et passés à l’eau bouillante, les mouches sont présentes et se posent sur les couverts. Par endroits, il y a des plafonds qui commencent par se dégrader et renvoient de temps en temps de la poudre du bois dans les nourritures. De la sorte, la sécurité sanitaire des aliments n’y est pas souvent de mise. En ce qui concerne le troisième type de gargotes décrites par 38,30 % des consommateurs, il y est noté non seulement la présence de mouches, mais aussi des ordures à proximité de leurs lieux d’implantation. Les cuillères sont lavées, mais pas passées à l’eau bouillante. Les vendeuses (eurs) manquent ostensiblement de rigueur par rapport à l’hygiène devant entourer les matériels (couverts) pour le service des repas. Les consommateurs ont relevé une certaine négligence chez ces vendeuses. Les couverts ne sont pas toujours bien gérés, le rinçage après la vaisselle ne se fait pas toujours bien, du fait qu’il faut vite satisfaire les files d’attente. Aussi, est-il observé que les vendeuses gardent bien des fois, de l’eau déjà usée pour rincer les assiettes et les cuillères.
En somme, les perceptions des gargotes varient d’un consommateur à un autre. Toutefois, la majorité s’accorde sur le fait que la sécurité sanitaire des aliments n’est pas garantie à ces lieux, et que les usagers encourent potentiellement un risque de maladies. Même s’il demeure vrai que l’alimentation hors domicile représente une réponse utile face aux contraintes liées à la vie professionnelle et au besoin de s’alimenter à moindre coût à Cotonou, les consommateurs sont plus nombreux à souligner le manque d’hygiène et d’assainissement dont ces lieux sont souvent objet, de même que la mauvaise qualité des mets qui y sont souvent vendus.
2.3.3. Quelques affections d’origine alimentaire à Cotonou : cas reçus àl’hôpital de zone de Mènontin de 2012 à 2016
2.3.3.1. Types d’affections
Les types d’affections d’origine alimentaire observées dans les données statistiques mises à notre disposition à l’hôpital de zone de Mènontin, sont présentés à travers le tableau 3 ci-après :
La lecture du tableau n° 3 révèle que les affections les plus récurrentes sont la diarrhée et la gastro-entérite d’origine présumée infectieuse. En moyenne 365 personnes souffrant de ces affections sont reçues par an à l’hôpital de Mènontin. Après celles-ci, suivent par ordre d’importance les gastro-entérites et colites non infectieuses, les intoxications bactériennes d’origine alimentaire, les infections intestinales bactériennes, les parasitoses intestinales, et les fièvres typhoïdes et paratyphoïdes.
2.3.3.2. Affections en fonction des tranches d’âge
Le tableau n°4 qui suit, présente le nombre moyen de personnes ayant souffert de ces affections d’origine alimentaire par tranche d’âge.
L’analyse de ce tableau par classe d’âge, laisse figurer deux situations : la première se rapporte aux affections de "la diarrhée et gastro-entérite d’origine présumée infectieuse", maladies plus récurrentes, hormis chez les enfants de moins d’un mois. La seconde situation est relative à la catégorie des individus âgés de 15 ans et plus, qui sont les personnes les plus sujettes de manière très remarquable à toutes les affections. Dans cet ordre d’idées, les analyses révèlent que plus l’âge accroît, plus les individus sont exposés à ces affections. Ceci revient à affirmer que plus l’âge augmente, plus les acteurs sociaux perdent le contrôle sur leur alimentation. Ils sont beaucoup plus ouverts à la restauration hors domicile et se trouvent ainsi beaucoup plus exposés aux différentes maladies liées à l’alimentation.
2.2.3.3. Evolution des affections dans le temps
La figure n°1 qui suit, présente le nombre d’individus ayant souffert de ces affections par an. Elle permet de noter l’évolution des proportions de 2012 à 2016.
L’analyse de ces données année par année, de 2012 à 2016, signale que le nombre d’individus ayant souffert de diarrhée et de gastro-entérite d’origine présumée infectieuse, diminue dans le temps. Il en est de même pour la parasitose intestinale. Par contre, au sujet des intoxications bactériennes d’origine alimentaire, le nombre de personnes affectées a connu un pic remarquable en 2015. Le nombre de personnes souffrant de gastro-entérite et colite non infectieuse, a connu aussi une baisse légère de 2013 à 2015 et ensuite une augmentation considérable en 2016, comme l’indique la figure n°1.
[2] Propos d’un conducteur de taxi moto, recueillis lors des entretiens individuels avec les usagers des gargotes.
[3] Revue du CAMES-Nouvelle Série B, Vol. 009 N°2-2007 (2ème semestre).
[4] Propos recueillis lors des entretiens auprès des consommateurs interviewés dans les gargotes.

Conclusion

Conclusion

L’habitude de ‘manger dehors’ a progressivement conduit à une culture de la restauration hors domicile à Cotonou. Qu’il s’agisse des matières premières ou des aliments préparés, l’hygiène et l’assainissement sont nécessaires. Or ceci manque ostensiblement chez les acteurs du secteur de la restauration hors domicile, notamment les vendeuses (eurs) dans les gargotes. Cette situation remarquable ne garantit pas une sécurité sanitaire des aliments et expose les populations urbaines à des risques potentiels de maladies. C’est ce qui se dégage de la présente recherche qui a porté sur « les risques sanitaires liés au recours à la restauration hors domicile : perceptions et pratiques des acteurs sociaux à Cotonou ». La prolifération des gargotes, lieux de restauration les plus fréquentés, de même que les risques sanitaires tangibles liés au recours à ces lieux, interpellent les acteurs publics et privées sur la nécessité de réformer ce secteur, pourtant pourvoyeur de ressources. Ceci permettra de replacer véritablement la nutrition au cœur du développement tel que souhaité par les autorités étatiques. L’insuffisance de données statistiques spécifiques sur les conséquences de ces risques sanitaires sur la vie des populations au Bénin invite à d’autres recherches plus approfondies, afin de maîtriser de façon efficiente la situation et d’aider les populations à mieux se prémunir contre les maladies d’origine alimentaire.

Références

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Publié

30 Juin 2020

Comment citer

Revue Espace, Territoires, Sociétés et Santé ,[En ligne], 2020,, mis en ligne le 30 Juin 2020. Consulté le . URL: https://www.retssa-ci.com/index.php?page=detail&k=104

Numéro

Rubrique

Espace,Sociétés et Santé