2021/Vol.4-N°7 : Mutations environnementales et risques sanitaires en Afrique

2 |INFLUENCE DE LA VARIABILITÉ CLIMATIQUE SUR L’INCIDENCE PALUSTRE DANS LA BÉNOUÉ (NORD-CAMEROUN)

INFLUENCE OF CLIMATE VARIABILITY ON MALUSTRIAL INCIDENCE IN BÉNOUÉ (NORTH CAMEROON)

Auteurs

  • DJIBIE KAPTCHOUANG Lionel Doctorant djibiekaptchouanglionel@yahoo.fr, Université de Dschang-Cameroun
  • TSAMO Louis Merlin Doctorant tsamo.louismerlin@yahoo.fr, Université de Dschang-Cameroun
  • TATA NFOR Julius Chargé de cours jtnfor2007@yahoo.com, Université de Dschang-Cameroun

Mots-clés:

variabilité climatique| incidences palustres| Bénoué perception du paludisme| correlation partielle|

Résumé

Établir le lien entre les incidences palustres et la variabilité climatique dans la Bénoué a été le centre d’intérêt de cet article. Objectif sous-tendu par le problème des fortes incidences palustres enregistrées globalement dans la région. Les données cliniques des districts de santé, les données climatiques téléchargées sur le site du portail d’information sur le climat (CIP), et les données d’enquêtes de terrain ont été utilisées. A la suite des analyses effectuées, nous avons relevé une croissance des incidences conforme à l’évolution des éléments climatiques. Cette évolution simultanée s’est trouvée conforter par les résultats du test de corrélation qui ont révélé globalement des relations statistiquement significatives entre les variables climatiques et les incidences palustres. Le test de corrélation partielle a par ailleurs permis de conclure que l’humidité est l’élément climatique qui influence le plus les incidences palustres dans la zone d’étude. À partir des résultats des enquêtes de terrain, il s’est avéré que la population étudiée a une bonne connaissance du paludisme et des moyens pour s’en prémunir. Ce qui contraste avec les fortes incidences qui sont enregistrées dans les différents districts de santé. La lutte contre le paludisme nécessite donc des interventions pluridisciplinaires.

Introduction

Le paludisme est une maladie endémique dans de nombreux pays de l’Afrique au Sud du Sahara (P. Saotoing et al., 2014, p. 1438). Il est la cause d’une forte morbidité et d’une létalité tout aussi considerable (M. M. Emery et al., 2015, p. 2). Au Cameroun, le paludisme demeure l’endémie majeur et la première cause de morbidité et de mortalité dans les groupes les plus vulnérables, précisément chez les enfants de moins de 5 ans et les femmes enceintes (A. M. Mbida et al., 2016, p. 105). Sa transmission est assurée par un vecteur appelé anophèle femelle, qui est fortement influencé par le climat qui varie au fil des saisons et des années. Dans ce sens, il est admis que selon les milieux éco-climatiques, les anophèles se pullulent plus ou moins aisément. Cette endémie a fait l’objet de nombreuses réflexions scientifiques. Ainsi, de nombreux auteurs tels que (A. K. Githeko et al., 2001, p. 64; F. C. Tanser et al., 2003, p. 1797, H. E. Tonnang et al., 2010, p. 4; V. Ermet et al., 2012, p. 80; T. K. Yamana et E. A. B. Eltahir, 2013, p. 1182), se sont attelés à effectuer des analyses prédictives de l’évolution de cette endémie en relation avec les grands changements observés dans le climat. La quintessence de ces travaux promet une évolution plus importante des incidences palustres en Afrique noire en rapport avec la variabilité du climat, et une modification de leurs distributions spatiales. Nous pouvons donc dire avec (S. Morand et C. Lajaunie 2015, p. 1) que le climat affecte dans sa variabilité l’écologie de certains agents pathogènes et la transmission de certaines maladies vectorielles. En outre, avec (J. Delmont 1982, p. 117) et (C. S. Houssou 2006, p. 319) que la transmission naturelle du paludisme n’est possible dans une localité donnée que si la pluviométrie, la température et l’hygrométrie conjuguent leurs efforts. La pluviométrie assurant la présence suffisante de l’eau pour la reproduction larvaire des anophèles, la température lorsqu’elle est élevée accélérant leur pullulation et une hygrométrie également élevée leur assurant une vie aérienne propice une fois à l’état adulte (Diouf I. et al., 2014, p. 3; E. O. Asare et L. K. Amekudzi 2017, p. 3). Ce qui laisse transparaitre comme le disent (N. Martiny et al., 2012, p. 74), une relation climat et paludisme complexe qui nécessite davantage d’études approfondies.
La région du Nord demeure l’une des régions les plus endémiques au paludisme au Cameroun. En effet, le rapport publié par le programme national de lutte contre le paludisme à l’occasion de la célébration de la 10e journée mondiale de lutte contre le paludisme en avril 2017, faisait état de 4000 morts des suites de paludisme en 2016 dont 70% étaient des enfants de moins de 5 ans et la région du Nord enregistrait le taux d’incidence le plus élevé soit 29,30% du taux global. La transmission y est qualifiée de saisonnière, car c’est pendant la saison des pluies que les incidences sont des plus élevées (C. Djeutchouang Sayang, 2010, p 32); ceci en dépit des strategies de lute mises sur sur pied en vue de son éradication. Il se pose donc le problème des fortes incidences palustres dans la région, particulièrement dans le département de la Bénoué qui compte sept districts de santé sur les 15 que possède la région. Ainsi, établir le lien entre la survenue du paludisme et l’évolution du climat revêt une importance capitale dans la mesure où il renseignerait sur les moments de l’année qui enregistrent les cas de malades élevés et donc les moments pendant lesquels les actions d’éradications devraient être des plus intenses. Autrement dit, quel est l’influence de la variabilité climatique sur l’incidence du paludisme dans le département de la Bénoué? D’emblée, nous postulons qu’il existe un lien étroit entre la variabilité climatique et les fortes incidences enregistrées dans le département. Alors, il nous importe dans cet article de déceler, d’une part, le poids du lien qui existe entre les fortes incidences et la variabilité du climat enregistrée dans le département de la Bénoué, et d’autre part déterminer l’élément climatique qui influence le plus ces incidences.

Méthodologie

1. Matériels et méthodes

1.1. Présentation de la zone d’étude

Cette étude s’est déroulée dans le département de la Bénoué, l’un des quatre départements de la région du Nord. Il se situe entre le 8° et le 9° de latitude Nord et entre le 12° et le 14° de longitude Est avec pour chef-lieu Garoua (carte n°1). Le département de la Bénoué s’étend sur une superficie de 13614 Km² avec une population estimée à près de 851955 habitants selon le BUCREP en 2010. Sur le plan administratif et sanitaire, le département compte 12 arrondissements et sept districts de santé. S’agissant du milieu physique, dans la cuvette de la Bénoué règne un climat tropical de type soudanien. C’est donc une zone semi-aride caractérisée par un climat chaud et sec, et par des saisons sèche et pluvieuse qui durent chacune six mois. L’hydrographie est marquée par l’existence du fleuve Bénoué et de nombreux mayo qui s’assèche sous le coup de la chaleur après la saison des pluies. Ce type de climat est favorable à l’existence de la savane dans ses différentes variantes. En outre, c’est un espace cosmopolite.
Carte n°1 : Département de la Bénoué

carte1

1.2.  Méthodologie

1.2.1.  Collecte des données
Les données utilisées dans ce travail proviennent de plusieurs sources. En effet, les données cliniques ont été obtenues au programme national de lutTe contre le paludisme (PNLP). Elles concernent les incidences palustres enregistrées dans tous les districts de santé du département, en occurrence les districts de santé de Bibémi, Garoua 1, Garoua 2, Gashiga, Lagdo, Ngong et de Pitoa de 2011 en 2017. En outre, les données climatiques, ont été téléchargées sur le portail d’information sur le climat (CIP, http://cip.csag.uct.ac.za). Il s’agit précisément des données des précipitations, des températures et de l’humidité relative allant de 2011 en 2017.
Enfin, dans le but de mesurer le niveau de connaissance et de perception des populations du département en rapport au paludisme, une enquête par questionnaire a été conduite auprès de celles-ci. Pour l’échantillonnage, sachant que la population totale N est estimée à près de 851 955 habitants, nous avons fixé la proportion des éléments de la population p = 0,5, avec un taux de confiance s = 95%, le coefficient de marge déduit du taux de confiance t = 1,96 et enfin la marge d’erreur e = 0,05 tout ceci applicable à la formule suivante (F.D. Giezendanner 2012, p. 6):
formule1
Les paramètres observés sont:
N: population totale
n: taille de l’échantillon
s: taux de confiance
t: coefficient de marge déduit du taux de confiance
e: marge d’erreur
p: proportion (connue ou supposée) des éléments de la population
En appliquant la formule, nous avons un échantillon de 384 individus. Le questionnaire visait à caractériser la population sur le plan socio-économique et démographique, à évaluer ses connaissances et sa perception du paludisme et à évaluer son accessibilité aux soins. Le questionnaire a été administré en octobre 2019. Précisément, il a été administré auprès des ménages des 12 arrondissements du département, soit 32 ménages par arrondissement. Ces ménages ont été enquêtés de manière aléatoire.
1.2.2.   Méthode de traitement des données
Ces données ont été représentées par des courbes permettant d’évaluer l’évolution des différentes incidences enregistrées au sein de la population cible, en fonction des éléments climatique. Ensuite, nous avons procédé à un test de corrélation pour mesurer le lien existant entre les différentes incidences enregistrées et les éléments climatiques. Et enfin, il a été effectué un test de corrélation partielle pour connaître parmi les éléments climatiques, celui qui influence le plus les incidences enregistrées.
Le coefficient de corrélation est un nombre réel sans unité, qui permet de quantifier la force de lien linéaire unissant diverses paires de variables. Soient X et Y deux variables aléatoires. Le coefficient de corrélation linéaire simple (ou de Pearson) noté  est obtenu en normalisant la covariance de X et Y par le produit de leur écart-types respectifs. Il est donné par la relation :

formule2

Il est toujours compris entre -1 et +1 et s’interprète de la manière suivante :
Lorsque dormule3vaut +1 (ou -1), cela traduit une forte liaison entre X et Y. Il y’a donc corrélation parfaite positive (ou négative) directe entre les variables X et Y. Cela signifie que Y augmente lorsque X augmente (ou diminue), et que X augmente (ou diminue) lorsque Y augmente. En d’autres termes, X et Y évoluent dans le même sens (ou dans le sens contraire) à chaque mouvement de marche.
Lorsque dormule3vaut zéro, cela signifie qu’il y’a absence de corrélation entre X et Y. On dit alors que X et Y sont totalement indépendants. C’est-à-dire qu’il n’existe aucun lien entre les mouvements de X et Y.
Toutefois, les corrélations parfaites ou la non corrélation interviennent très rarement. Pour cette raison on parle davantage d’une corrélation positive (ou négative) forte, moyenne ou faible. En générale dormule3s’interprète en valeur absolu (le signe étant juste utilisé pour quantifier la nature de la liaison). Ainsi :

formule 4

Le coefficient de corrélation partielle mesure la liaison entre deux variables
lorsque l’influence d’une ou des autres variables explicatives est retirée. Elle est très importante car elle permet de juger de la pertinence d’inclure une variable explicative dans un modèle. Il s’interprète comme suit : plus le coefficient de corrélation partielle d’une variable est élevé, plus la contribution de cette variable est importante à l’explication globale du modèle. Il se calcule de deux manières mais le plus souvent on le calcul à partir du coefficient de corrélation de Pearson et ce de la façon suivante :
Etape 1 : On calcule le résidu de la régression de la variable à expliquer sur le sous-ensemble des k-1 autres variables explicatives.
Etape 2 : On calcule le résidu de la régression de la variable explicative xi sur les k-1 variables explicatives.
Etape 3 : On calcule le coefficient de Pearson entre le résidu obtenu à l’étape 1 et celui obtenu à l’étape 2.

Résultats

2. Résultats

Les principaux résultats obtenus traitent d’abord de l’évolution des incidences en rapport aux éléments du climat pendant la période d’étude. Ensuite des tests de corrélation et de corrélation partielle entre les incidences et les différents éléments climatiques considérés dans l’étude. Enfin, des connaissances et perceptions de la population d’étude en rapport au paludisme.

2.1.  Evolution des incidences par rapport aux éléments climatiques de 2011 en 2017

2.1.1. Evolution des incidences palustres par rapport aux éléments climatiques en 2011
En 2011, les données des incidences et des éléments climatiques sont représentées dans le Graphique n°1 ci-dessous. Il en ressort que pendant l’année, les précipitations se sont étendues d’avril en octobre, août étant le mois le plus pluvieux. La température maximale et la température minimale ont été enregistrées respectivement pendant les mois de mars, d’avril et les mois de janvier et d’août. S’agissant de l’humidité, le mois de mars est le mois le plus sec et le mois le plus humide c’est le d’août. En lisant simultanément ces éléments du climat et la distribution mensuelle des incidences, on constate que les incidences sont autant très élevées en saison sèche qu’en saison des pluies.
Graphique n°1 : Evolution des incidences palustres par rapport aux éléments climatiques en 2011graphique1
Source : PNLP 2017
Aucune relation du point de vue statistique n’a été significative entre les variables climatiques et les incidences palustres enregistrées. En effet, entre les incidences et les précipitations, on a obtenu un coefficient de corrélation égal à 0,50 et une valeur significative de 0,09. Entre les incidences et les températures, un coefficient égal -0,49 et une valeur significative de 0,09 ont été obtenus. Enfin, entre les incidences et l’humidité on a obtenu un coefficient de 0,42 et une valeur significative de 0,16. En outre, le test de corrélation partielle permet de voir que ce sont les températures qui agit le plus sur les incidences avec un pourcentage de 16,60% contre 10,64% pour les précipitations et 2,70% pour l’humidité.
2.1.2. Evolution des incidences par rapport aux éléments climatiques en 2012
Les données climatiques et les incidences palustres de l’année 2012 ont été représentées dans le Graphique n°2 ci-contre. On peut en retenir traitant des données climatiques que les précipitations ont débuté en avril et ont pris fin en octobre, le mois le plus pluvieux étant de septembre. Les températures les plus élevées ont été relevées pendant les mois de février, mars et d’avril, et les mois de juillet à août puis de décembre ont enregistré les températures les plus basses. Le mois de mars est le plus sec et le mois de septembre, le plus humide. Concernant les incidences, on remarque qu’elles sont relativement faibles pendant les mois de janvier à mars qui correspondent à la saison sèche et pendant les deux premiers mois de la saison sèche. Ensuite à partir de juin, on assiste à une croissance continue des cas jusqu’en octobre où le pic des incidences est atteint.
Graphique n°2 : Evolution des incidences palustres par rapport aux éléments climatiques en 2012
graphique2
Source: PNLP 2017
Le résultat du test de corrélation effectué entre les précipitations et les incidences a donné un coefficient de 0,67 et une valeur significative de 0,01. Alors, au seuil de 5%, il existe une relation moyenne et positive entre les deux variables. Entre les températures et les incidences, on a obtenu un coefficient de -0,54 et une valeur significative de 0,06, il n’existe donc pas de corrélation entre ces variables. Enfin, entre l’humidité et les incidences, on a eu un coefficient de 0,75 et une valeur significative de 0,00, par conséquent, il existe une forte corrélation positive entre les deux variables au seuil 1%. Par ailleurs, avec le test de corrélation partielle, on s’aperçoit que l’humidité avec 12,37% est l’élément climatique qui influence le plus les incidences. Contre 2,21% pour les températures et 0,36% pour les précipitations.
2.1.3. Evolution des incidences par rapport aux éléments climatiques en 2013
En 2013, les données climatiques peuvent être décrites de la manière suivante : les précipitations ont débuté en avril et ont pris fin en octobre et le mois de juillet a été le plus pluvieux. La température maximale a été enregistrée au mois de mars et la température minimale au mois d’août. Juillet a été le mois le plus humide et février le mois le plus sec. Concernant les incidences, elles ont été faibles pendant les mois de janvier à mars (saison sèche), puis très faibles en début de saison pluvieuse. A partir de juillet, on a assisté à une augmentation progressive jusqu’en octobre où les incidences les plus élevées ont été enregistrées (Graphique n°3).
Graphique n°3: Evolution des incidences palustres par rapport aux éléments climatiques en 2013
graphique3
Source: PNLP 2017
Les résultats du test de corrélation effectuée entre les incidences palustres relevées et les éléments du climat sont les suivants : entre les précipitations et les incidences, on a obtenu un coefficient de 0,44 et une valeur significative de 0,15. Par conséquent, les deux variables ne sont pas liées. Entre les températures et les incidences, on a obtenu un coefficient de -0,62 et une valeur significative de 0,02 donc au seuil de 5%, une relation négative et moyenne existe entre les deux variables. Enfin, entre l’humidité et les incidences, on a obtenu un coefficient de 0,63 et une valeur significative de 0,02 ce qui signifie qu’au seuil de 5%, il y a un lien positif et moyen entre ces variables. De plus, le test de corrélation partielle permet de voir que l’humidité avec 37,38% agit le plus sur les incidences palustres. Contre 11,44% pour les temperatures et 27,41% pour les precipitations.
2.1.4. Evolution des incidences par rapport aux éléments climatiques en 2014
Les données climatiques et des incidences palustres pour l’année 2014 ont été représentées par le Graphique n°4 ci-après. Il en résulte traitant des éléments climatiques que: le mois d’août a été le plus pluvieux, et les précipitations se sont étendues d’avril en octobre. La température la plus élevée a été notée en mars et la plus basse en août. Le mois le plus sec a été le mois de février et celui le plus humide, août. S’agissant des incidences, elles ont été faibles pendant la saison sèche. Ensuite, elles ont progressivement augmenté à partir du début de la saison des pluies en avril, jusqu’en octobre où le plus grand nombre de cas a été relevé.
Les résultats du test de corrélation réalisé entre les incidences palustres et les éléments du climat sont les suivants: entre les précipitations et les incidences palustres, on a eu un coefficient de 0,33 et une valeur significative de 0,29. En conséquence, aucune relation n’existe entre ces variables. Ensuite, entre les températures et les incidences, on a eu un coefficient de -0,67 et une valeur significative de 0,01 ainsi au seuil de 5%, il existe une relation moyenne et négative entre ces variables. Enfin, entre l’humidité et les incidences, on a eu un coefficient de 0,66 et une valeur significative de 0,01 ainsi, au seuil de 5% il existe une relation moyenne et positive entre ces variables. Une fois de plus, l’humidité avec 62,92% est l’élément climatique qui influence le plus les incidences palustres. Contre 31,01% pour les températures et 52,81% pour les précipitations.
Graphique n°4: Evolution des incidences palustres par rapport aux éléments climatiques en 2014
graphique4
Source: PNLP 2017
2.1.5. Evolution des incidences par rapport aux éléments climatiques en 2015
Le Graphique n°5 présente les données des incidences palustres et des éléments du climat enregistrées en 2015. On en retient que, les précipitations se sont étendues du mois de mai au mois d’octobre, le mois d’août étant le plus pluvieux. Les températures les plus fortes ont été relevées en mars et en avril, et la plus faible en décembre. Le mois le plus sec a été janvier et le plus humide le mois d’août. Les incidences quant à elles ont été globalement faibles en saison sèche et fortes en saison des pluies. Le mois d’octobre a enregistré le plus grand nombre de cas de paludisme en 2015.
Le test de corrélation effectué entre les incidences palustres et les éléments climatiques a donné les résultats ci-après: entre les précipitations et les incidences, on a eu un coefficient de 0,47 et une valeur significative de 0,11. Alors, les deux variables ne sont pas associées. Ensuite, entre les températures et les incidences, on a eu un coefficient de -0,49 et une valeur significative de 0,10 ce qui signifie que les deux variables ne sont pas associées. Enfin, entre l’humidité et les incidences ont eu un coefficient de 0,63 et une valeur significative de 0,02 ainsi au seuil de 5%, ces deux variables ont un lien moyen et positif. En outre, l’humidité est l’élément climatique qui agit le plus sur les incidences palustres avec une proportion de 32,64%. Contre 13,55% pour les températures et 16,79% pour les précipitations.
Graphique n°5: Evolution des incidences palustres par rapport aux éléments climatiques en 2015graphique5
Source: PNLP 2017
2.1.6. Evolution des incidences par rapport aux éléments climatiques en 2016
Les données climatiques et des incidences palustres obtenues en 2016 ont été représentées dans le Graphique n°6 ci-dessous. Il en ressort que les précipitations ont débuté en avril et ont pris fin en octobre, avec un pic en septembre. La température la plus élevées a été obtenue en mars et la plus faible en juillet. Le mois d’août a été le plus humide et le mois de février le plus sec. Traitant des incidences palustres, elles ont été un peu forte en saison sèche puis ont chuté en début de saison des pluies avant de recommencer à croître et d’atteindre un pic en septembre.
Le test de corrélation réalisé a donné les résultats ci-après: entre les précipitations et les incidences, on a obtenu un coefficient de 0,48 et une valeur significative de 0,11. Par conséquent, aucune relation n’existe entre ces variables. Ensuite, entre les températures et les incidences, on a obtenu un coefficient de -0,70 et une valeur significative de 0,01 en conséquence, au seuil de 5% on a une relation négative moyenne entre ces variables. Enfin, entre l’humidité et les incidences, on a obtenu un coefficient de 0,63 et une valeur significative de 0,02 par conséquent, on a une relation positive et moyenne entre ces variables. Par ailleurs, les températures avec 37,72% influencent le plus incidences palustres. Contre 24,96% pour l’humidité et 9,90% pour les précipitations.
Graphique n°6, Evolution des incidences palustres par rapport aux éléments climatiques en 2016
graphique6
Source: PNLP 2017
2.1.7. Evolution des incidences par rapport aux éléments climatiques en 2017
En 2017, les données des incidences palustres et des éléments climatiques enregistrées ont été représentées par le Graphique n°7. Il en ressort qu’avec un pic en juillet, les précipitations se sont étendues d’avril en octobre. Les températures maximales ont été enregistrées en mars et en avril, et la température minimale a été relevée en août. Le mois le plus sec est celui de février et août le mois le plus humide. Les incidences palustres quant à elles ont été un peu fortes en saison sèche puis elles ont chuté en début de saison pluvieuse, avant de recommencer à croître et d’atteindre un pic en octobre.
Graphique n°7: Evolution des incidences palustres par rapport aux éléments climatiques en 2017
graphique7
Source: PNLP 2017
D’après les résultats du test de corrélation réalisé entre les éléments climatiques et les incidences palustres, aucune relation statistique n’est significative entre ces différentes variables. En effet, entre les précipitations et les incidences, on a obtenu un coefficient de          -0,02 et une valeur significative de 0,94. Ensuite entre les températures et les incidences, on a obtenu un coefficient de -0,47 et une valeur significative de 0,12. Enfin, entre l’humidité et les incidences, on a obtenu un coefficient de 0,35 et une valeur significative de 0,25. En outre, les précipitations avec 43,42% influencent le plus les incidences. Contre 3,16% pour les températures et 38,54% pour l’humidité.

2.2. Perceptions, connaissances de la population d’étude et lutte contre le paludisme

2.2.1. Perceptions du milieu immédiat de vie, facteur de transmission du paludisme
Le milieu immédiat de vie est un facteur qui peut contribuer à l’explication des fortes incidences enregistrées dans une localité donnée. Il est donc question ici d’évaluer comment la population d’étude perçoit son milieu de vie. Ainsi, 39,30% des enquêtés considèrent que leur environnement immédiat de vie n’est pas propre, 53,90% considèrent qu’il est un peu propre et seulement 6,80% considèrent que leur environnement immédiat de vie est propre. En outre, 70,10% de ces enquêtés affirment qu’il existe dans leur localité des mares d’eau stagnantes. Alors, on peut dire que ces populations vivent dans un environnement très favorable au développement des vecteurs du paludisme.
2.2.2. Evaluation des connaissances générales sur le paludisme de la population d’étude
Traitant des connaissances générales sur le paludisme, 99,70% des enquêtés connaissent ce que c’est que le paludisme, 90,40% en connaissent les symptômes, 82% pensent qu’il se transmet par des piqûres de l’anophèle femelle, 9,40% qu’il se transmet par la consommation d’une eau non potable, et 8,60% qu’il se transmet par la consommation des aliments souillés. En outre, 95,80% des répondants savent que la transmission du paludisme se passe pendant la nuit essentiellement. Ils savent également que pour s’en prévenir, il faut utiliser des insecticides, faire des pulvérisations intra domiciliaires, assainir son environnement de vie immédiat et dormir sous des Moustiquaires Imprégnées de Longue Durée d’Action (MILDA). A propos, les enquêtés à 97,70% possèdent des MILDA, pour 83,10% d’entre eux, ces MILDA sont suffisant pour toute la famille. En plus, à la question de savoir s’ils dorment effectivement sous ces MILDA, ils ont à 87,80% répondu par l’affirmative. D’ailleurs, 88% de ces répondants ont dormi sous des MILDA la veille du jour où ils ont répondu au questionnaire, en plus à 63% ils pensent qu’on devrait dormir sous une MILDA à toutes les saisons, donc pendant toute l’année. Cependant, seulement 45,30% de notre échantillon savent que faire la fièvre ne signifie pas qu’on a le paludisme car, on fait la fièvre quand on a le paludisme, mais on peut faire la fièvre sans avoir le paludisme. En somme, notre échantillon présente un niveau de connaissance sur le paludisme très satisfaisant, ce qui est un atout majeur dans la lutte contre cette maladie.
Ce niveau de connaissance élevé du paludisme par la population résulte certainement d’une forte communication autour de cette maladie, notamment en ce qui concerne sa transmission, ses symptômes, son traitement et sa prévention. En effet, le paludisme dans le département fait partie du quotidien de la population, il fait toujours l’objet des discussions entre voisin, entre collègue, c’est un sujet d’actualité. D’ailleurs, 90,40% de notre échantillon affirment parler quotidiennement du paludisme même lorsqu’ils n’en sont pas victimes, puisqu’il y a toujours un proche qui en souffre. De plus, 87,50% de ces enquêtés écoutent quotidiennement des informations portant sur le paludisme. Ils le font généralement par le canal des émissions radio et ou télédiffusés. Outre les émissions radio et télédiffusés, il existe aussi des campagnes de lutte contre le paludisme qui sont organisées. Dans ce sens, 94,30% déclarent qu’il est souvent organisé dans leur localité des campagnes de lutte contre le paludisme, et ils y participent à 78,60%, enfin à 98,20% les enquêtés ont pleinement conscience de l’importance de la tenue de telles campagnes et de leur caractère bénéfique pour la population entière. Car ils peuvent acquérir de nouvelle méthode de lutte contre le paludisme, aussi ils peuvent bénéficier de la distribution des MILDA.

Conclusion

Conclusion

L’objectif de ce travail a été d’étudier l’impact de la variabilité climatique sur l’incidence du paludisme dans le département de la Bénoué et de déterminer parmi les éléments climatique celui qui influence le plus lesdites incidences. Pour ce faire, il a été utilisé les données cliniques du département et les données climatiques de réanalyses issues du site du portail d’information sur le climat (CIP). Aussi, une enquête sociodémographique a été réalisée. A partir de ces données, des courbes présentant simultanément les données cliniques et les données climatiques ont été réalisées. En outre, nous avons effectué un test de corrélation et un test de corrélation partielle, dans le but de mesurer le poids du lien existant entre les variables cliniques et les variables climatiques. Ainsi, nous pouvons retenir que les incidences palustres ont évolué en fonction de l’occurrence des éléments climatiques. En effet les fortes incidences ont été obtenues dans des conditions où les températures, les précipitations et l’humidité étaient des plus favorables. Ensuite, le test de corrélation effectué a révélé des relations significatives de manière générale entre les différentes variables. Le test de corrélation partielle a révélé que globalement l’humidité est l’élément climatique qui agit le plus sur les incidences palustres dans notre zone d’étude. On peut également relever que le niveau de connaissance et d’information des populations par rapport au paludisme est globalement satisfaisant.
Enfin, compte tenu du fait que les incidences enregistrées suivant l’occurrence des éléments climatiques, compte tenu également des relations statistiquement significatives qui ont été établies entre les incidences et les éléments du climat, il est recommandé de considérer le climat comme un facteur pouvant contribuer à la pullulation des anophèles dans l’élaboration des stratégies de lutte contre le paludisme.

Références

Références bibliographiques

ADEWI Essotalani et DUBREUIL Vincent., 2012, « Variabilité climatique et paludisme à Kara, une ville du nord-Togo », Actes du 25eme colloque de l’association internationale de climatologie, Grenoble pp 57-62.
ASARE Ernest O. et AMEKUDZI Leonard K., 2017, « Assessing climate driven malaria variability in Ghana using a regional scale dynamical model”, Climate 2017, 5, 20; doi:10.3390/cli5010020, http://www.mdpi.com/journal/climate.
BADURU Yahaya Usman, ADEJOKE Akiode Olukemi, ABUBAKAR Ahmed Sadauki et EMIGILATI Mohammed Ahmed, 2014, “Rainfall variations as the determinant of malaria in the federal capital territory Abuja, Nigeria”, Journal of Environment and Earth Science www.iiste.org ISSN 2224-3216 (Paper) ISSN 2225-0948 (Online) Vol.4, No.20, p. 149-159.
DANSOU B. S. et ODOULAMI L., 2015, « Paramètres Climatiques et Occurrence du Paludisme dans la Commune de Pobè, au Sud-Est Du Bénin », Actes 28e colloque de l’association internationale de climatologie, Liège, p. 129-132.
DELMONT Jean, 1982, « Paludisme et variations climatiques saisonnières en savane soudanienne d’Afrique de l’Ouest », In: Cahiers d'études africaines, vol. 22, n°85-86, 1982. Études épidémiologiques et approches géographiques des maladies en Afrique tropicale. Mélanges pour un dialogue. pp. 117-133; doi: 10.3406/cea.1982.2276
DIOMANDE Béh Ibrahim, COULIBALY Kolotioloma Alama et SOUMAHORO Saï Pou, 2017, « Variabilité climatique et recrudescence du paludisme à Niangon dans la commune de Yopougon-Abidjan (COTE D’IVOIRE) », Revue Ivoirienne de Géographie des Savanes, Numéro 3 Décembre 2017, ISSN 2521-2125.
DIOUF Ibrahima, DEME Abdoulaye, RODRIGUEZ FONSECA Belén, CISSE Moustapha, NDIONE Jacques-André et GAYE Amadou Thierno, 2015, «Détermination des paramètres du paludisme au Sénégal à partir de données météorologiques de stations et de réanalyses» Actes 28e colloque de l’association internationale de climatologie, Liège, p. 133-139.
DIOUF Ibrahim, DEME Abdoulaye, RODRIGUEZ FONSECA Belén, CISSE Moustapha, NDIONE Jacques-André et GAYE Amadou Thierno, 2014, «Climat-Santé»: Observation et Modélisation du paludisme au FERLO (Sénégal) et au Sahel», https://www.researchgate.net/publication/267506366.
DJEUTCHOUANG SAYANG Colins, 2010, “Intéret de l’utilisation des tests de diagnostic rapide du paludisme sur le coût et l’efficacité de la prise en charge des patients fébriles à Yaoundé, Cameroun” Thèse de Doctorat Université de la Méditérannée, Faculté de Méddecine de Marseille.
GITHEKO Andrew K., LINDSAY Steve W., CONFALONIERI Ulisses E. et PATZ Jonathan A., 2001, “Changement climatique et maladies à transmission vectorielle: une analyse régionale”, Bulletin de l’Organisation mondiale de la Sante´
Recueil d’articles No 4, p. 62-72.
GOUATAINE SEINGUE Romain et YMBA Maïmouna., 2018, « Variabilité climatique et émergence du paludisme à Bongor (Tchad) », Revue Espace, Territoires, Sociétés et Santé, 1 (2), 143-156.
HOUSSOU Christophe S., VISSIN Expedit W, et PERARD Jocelyne, 2006, « Variabilité climatique et pathologie dans le département du Mono (Bénin, Afrique de l’ouest) », Actes du XIXe colloque international de climatologie, Epernay, p. 316-321.
MARTINY Nadège, DESSAY Nadine, YAKA Pascal, TOURE Ousmane, SULTANT Benjamin et al, 2012, “Le climat, facteur de risqué pour la santé en Afrique de l’Ouest”, La Météorologie, Météo et Climat, pp.73-79. 10.4267/2042/48135 hal-00757107.
MATUBI Emery Metelo, BUKALA E., BAKAMBANA LUEMBA T., SITUAKIBANZA H., SANGARE I., MESIA G., MUMBA NGOYI D. et al, 2015, “Détermination des paramètres bioécologiques et entomologiques d’Anophèles gambiae sl dans la transmission du paludisme à Bandundu-ville, République Démocratique de Congo », Pan Afr Med J v.22; 2015  PMC4732634.
MBIDA MBIDA Arthur, ETANG Josiane, AKONO NTONGA Patrick, TALIPOUO Abdou, AWONO-AMBENE Parfait et al, 2016, « Preliminary investigation on aggressive culicidae fauna and malaria transmission in two wetlanfs of the Wouri river estuary, Littoral-Cameroon », Journal of Entomology and Zoology Studies 2016; 4(6): 105-110.
MORAND Serge et LAJAUNIE Claire, 2015, « Climat et maladies infectieuses », VRS n° 402 / novembre 2015 p. 23-26.
SAOTOING Pierre, FOHOUO TCHENGUEM Fernand Nestor, DAWE Amadou et NGATARANG Célestine, 2014, «Évaluation de l’effet insecticide de l’extrait acétonique des feuilles séchées de Calotropis procera Ait. (Asclepiadaceae) chez les adultes de Anopheles gambiae, Maroua (Cameroun)», http://ajol.info/index.php/ijbcs, Int. J. Biol. Chem. Sci. 8(4): 1438-1444.
TANSER Frank C., SHARP Brian et LE SUEUR David, 2003, « Potential effect of climate change on malaria transmission in Africa », THE LANCET, Vol 362, p. 1792-1798.
TONNANG Henri EZ, YM KANGALAWE Richard et Z. YANDA Pius, 2010, « Predicting and mapping malaria under climate change scenarios: the potential redistribution of malaria vectors in Africa », Malaria Journal 2010, 9:111 http://www.malariajournal.com/content/9/1/111, p. 1179-1186.
TOTIN VODOUNON S. H., CHABI ADJERE D., AMOUSSOU E., HOUSSOU S. Ch., et BOKO M., 2018, « Ambiances bioclimatiques et santé des populations dans le domaine subsoudanien au Benin », Actes du 31e colloque international de l’association de climatologie, Nice, 4-7.7.2018, p. 337-342.
VOLKER Ermet, FINK Andreas H., MORSE Andrew P.  et PAETH Heiko, 2012, “The impact of regional climate change on malaria risk due to greenhouse forcing and land-use changes in tropical Africa” Environmental Health Perspectives, vol 120 n°1, p. 77-84.
YAMANA Teresa K. et EIFATIH A.B. ELTAHIR, 2013, “Projected Impacts of Climate Change on Environmental Suitability for Malaria Transmission in West Africa”, http://dx.doi.org/10.1289/ehp.1206174. Environmental Health Perspectives • vol 121,n°10, p 1179-1186.

Downloads

Publié

Comment citer

Revue Espace, Territoires, Sociétés et Santé ,[En ligne], 2021,, mis en ligne le . Consulté le . URL: https://retssa-ci.com/index.php?page=detail&k=179

Numéro

Rubrique

Qui sommes-nous ?