2018/Vol.1-N°1 : Dynamiques, spatiales,territoriales et santé en milieu urbain

6 |Recours à l'assainissement traditionnel, source de maladies diarrhéiques dans la commune de Bongouanou (centre-est de la Côte d'Ivoire)

Resorting to the traditional sanitation, source of diarrheal diseases in the Bongouanou township (center east in C

Auteurs

  • DIABIA Thomas Mathieu Doctorant diathomath@gmail.com, Université Félix Houphouët-Boigny -Abidjan, Côte d’Ivoire
  • BECHI Grah Félix Maître de Conférences felixbechi@yahoo.fr, Université Alassane Ouattara de Bouaké, Côte d’Ivoire

Mots-clés:

Bongouanou| assainissement traditionnel| maladies diarrhéiques| rural| urbain|

Résumé

Le problème que relève cette recherche est lié au débordement des fosses septiques qui expose la population aux maladies environnementales. Elle a pour objectif d’étudier les risques sanitaires liés au débordement des fosses septiques sur la population. A l’aide d’une recherche documentaire et d’enquête de terrain, des informations ont été collectées. Les résultats obtenus indiquent que l’inexistence ou l’insuffisance du système d’assainissement collectif fait que les installations autonomes constituent l’essentiel pour l’évacuation des déchets fécaux. L’enquête indique que le débordement des fosses incombe la responsabilité de la population et des autorités publiques. Sur un échantillon de 267 chefs de ménage interrogés, seulement 4,12 % sont raccordés au réseau d’assainissement collectif et une large couverture au réseau autonome de type fosse septique (95,88 %). Ces installations autonomes ont été vidées à 49,22 % contre 50,78 %. La majorité de la vidange s’est faite manuellement (80,16 %). Dans ces conditions, le débordement des fosses constitue une réelle menace pour la santé humaine. Les nuisances visuelles et olfactives ont été exprimées dans les mêmes proportions (50 %) par les enquêtés. Les enquêtés ont signalé également la présence de moustiques (62,97 %), de rongeurs (23,35 %) et d’autres agents (13,68 %) comme vecteurs de maladies.

Introduction

Les services sociaux de base (assainissement, eau potable, hygiène, l’habitat, etc.) sont nécessaires et vitaux pour le bien-être des populations mais aussi pour la bonne marche et l’efficacité économique d’un espace ménagé. Le programme commun OMS/UNICEF (2017) révèle que 4,5 milliards de la population mondiale ne disposent pas d’un assainissement sûr, dont 892 millions défèquent à l’air libre. En Afrique subsaharienne, le taux d’accès à un assainissement convenable est moins de 17% OMS/UNICEF (2017). Au niveau de la Côte d’Ivoire, ce taux est de 22% (ONAD, 2015). Malgré leurs nombreux bienfaits, en Côte d’Ivoire, les installations sanitaires font l’objet d’une crise généralisée depuis plus de deux décennies (INS, 2003 ‘’ENV-2002’’). L’absence de financement approprié et le manque de professionnalisme des entreprises du secteur sont, selon le MEPD (2007, p. 77), les causes fondamentales de cette crise. Dans la plupart des villes de l’intérieur, l’on note l’inexistence de schéma directeur d’assainissement (MEPD, 2007, p. 78) ; alors que l’accès adéquat aux infrastructures d’assainissement amène une diminution de 32% des risques de contraction des maladies diarrhéiques (OMS/UNICEF, 2004). Le rapport entre l’accès à l’assainissement et les risques de contraction des maladies diarrhéiques est mis en évidence par plusieurs auteurs, notamment N. B. A. Banza et al. (2007, p. 52) à Yaoundé au Cameroun. Pour lui, ce sont les comportements qui sont la clé de la santé publique. Dès lors que les individus ne possèdent pas assez d’eau potable pour faire face aux besoins quotidiens, et n’ont pas accès à un assainissement adéquat, alors les risques sanitaires sont toujours élevés. En effet, face à l’urbanisation rapide en Côte d’Ivoire et au déficit d’équipements des villes ivoiriennes en matière d’infrastructures de base, le recours à l’assainissement traditionnel se pose comme un des modes de gestion de l’environnement urbain. Bongouanou en est un exemple.             
En matière d’assainissement, Bongouanou n’est pas équipé (MLCVE, 1997, p. 23). Dans le même temps, la proportion de la population victime des pathologies diarrhéiques est de 62,64% à l’échelle communale, dont 62,64% chez les citadins et 56,67% chez les ruraux (P. Tuo et al., 2017, p. 55). Ces constats renvoient au problème des pathologies diarrhéiques dues au recours à l’assainissement autonome traditionnel. Alors, existe-t-il un rapport scientifique entre les ménages qui recourent à l’assainissement traditionnel et les maladies diarrhéiques à Bongouanou ? Cette étude se propose d’analyser la relation entre le recours à l’assainissement traditionnel et l’expansion des affections diarrhéiques dans les ménages de la commune de Bongouanou. Il s’agit d’étudier le recours des ménages au type d’assainissement, d’analyser les affections diarrhéiques contractées par les ménages de Bongouanou et de vérifier le lien qui existe entre ces deux composantes. L’étude repose sur l’hypothèse selon  laquelle le faible taux d’accès à l’assainissement moderne est source de la prévalence des affections diarrhéiques à Bongouanou.

1. Cadre géographique de Bongouanou

La commune de Bongouanou est située au Centre-Est de la Côte d’Ivoire, dans la région du Moronou (Carte n°1). Elle est comprise entre la latitude 6°39 et la longitude 4°12.      La température communale varie entre 19°C et 33°C et la pluviométrie oscille entre 1 200 mm et 1 800 mm. Le taux d’hygrométrie (humidité) moyen avoisine 75% (MLCVE, 1997, p. 6).          La commune est inscrite sur un relief de plateau surmonté de nombreuses collines et de vallonnements (MLCVE, 1997, p. 18). Elle a une végétation anciennement constituée de forêt dense. Cependant, celle-ci a subi une très forte dégradation du fait de l’augmentation de la population et du système d’exploitation qu’elle a adopté (culture extensive sur brûlis). La zone fait en effet partie de l’une des plus importantes de la première boucle du cacao ivoirien (1960-1980) « B. Dian, 1985, p. 240 ». Cela justifie évidemment le préjudice subi par l’écosystème forestier, qui, pourtant est un véritable déterminant tant pour la précipitation que pour l’environnement tout entier. De par sa position, Bongouanou bénéficie d’un climat intertropical chaud et humide comportant quatre saisons : une grande saison sèche de Novembre à Mars, une grande saison des pluies d’Avril à Juillet, une petite saison sèche d’Août à Septembre et une petite saison des pluies de Septembre à Octobre.
Carte n°1 : Présentation de la commune de Bongouanou

Bongouanou est peuplé d’Agni-Moroffouè (population autochtone) et d’autres groupes ethniques tant ivoiriens qu’étrangers. La population communale a évolué de 12 714 habitants en 1970 à 29 148 habitants en 1988, soit plus du double en 13 ans (MLCVE, 1997, p. 8 et INS, 1988). En 1998, elle était de 31 827 habitants (INS, 1998). Sur la base des données de l’INS (1998), celle-ci est estimée à 36 938 habitants en 2015.

Méthodologie

2. Méthode de collecte et de traitement des données  

2.1. Méthodologie de collecte des données

Deux méthodes ont été utilisées pour collecter les données nécessaires. Il s’agit d’abord de la recherche documentaire. Elle a permis de bâtir l’introduction et d’engager la discussion des résultats obtenus. Puis, les données obtenues à partir de l’enquête de terrain dans les deux zones d’études. A défaut de faire un recensement, nous avons opté pour une enquête par échantillonnage auprès des chefs de ménages. Les questionnaires sont adressés aux chefs de ménages selon les critères suivants : type d’habitat, caractéristiques des ménages (situation professionnelle et niveau d’instruction), type de lieu d’aisance, mode d’évacuation des matières fécales et bien d’autres.  A l’intérieur de chaque zone d’étude (strate), nous avons appliqué le tirage systématique à probabilité inégale. Ce tout est appelé tirage ou plan d’échantillonnage systématique à probabilité inégale stratifiée. Elle permet d’obtenir une taille d’échantillon suffisante et représentative ; car l’échantillon aléatoire obtenu est à priori assuré par les lois statistiques de la probabilité (H. D. Mohamed, 2010). Aussi permet-elle de gagner du temps car tous les espaces ne sont pas forcément enquêtés. La méthode vise l’efficacité en termes de coût. Elle permet de tirer des zones d’étude  et le nombre de ménage enquêté par zone (V. Godard, 2010).  
En 1998, la commune comptait 5 228 ménages répartis en 8 villages et 9 quartiers                (INS, 1998). L’application de la méthode a permis de choisir 455 ménages dans la commune de Bongouanou, dont 245 à l’échelle urbaine et 210 à l’échelle rurale (Tableau n°1).
L’enquête n’a concerné que les espaces tirés. Pour chaque village ou quartier tiré, 35 chefs de ménages sont enquêtés. Le nombre de fois d’espace tiré détermine, en effet, le nombre de chefs de ménages enquêtés. Par exemple, en ville, le quartier Agnikro a été tiré trois fois (donc 105 chefs de ménages enquêtés), tandis que Kangandissou est tiré une fois (soit 35 ménages enquêtés). Cette inégalité de l’effectif de ménages enquêtés entre les quartiers est justifiée par la différence du poids démographique au niveau de ces zones de dénombrements.         
De même, en milieu rural, Tanosso est tiré une fois (35 ménages enquêtés), alors que le village d’Ehuikro n’est pas tiré (donc aucun chef de ménage n’est enquêté). Quant au village de Broukro, il a été tiré deux fois (dans ce village, environ la moitié des ménages vit dans les campements, donc 35 enquêtés dans les campements). 

2.2. Méthode de traitement des données

Pour le traitement et l’analyse des données recueillies, nous nous sommes appuyés sur les techniques statistiques. Toutes les données ont été saisies et traitées à l’aide des logiciels EPI data et Excel version 2013. EPI data a permis de saisir les données d’enquête. Puis ces résultats ont été exploités grâce à Excel version 2013. Le logiciel Excel a servi à élaborer les tableaux et graphiques. Puis, les croisements des tableaux, grâce à la méthode de régression linéaire de Bravais-Pearson nous ont permis d’établir des liens entre les variables (le coefficient de corrélation ‘’R’’). La méthode de Bravais-Pearson a servi également à mesurer l’intensité de ces relations par le biais du coefficient de détermination (R2). Ce lien a été vérifié à un taux de risque de 5%, autrement dit, un degré de liberté de 95%. Ce taux de risque ou cette marge d’erreur justifie ceci : pour une liaison ou un coefficient de corrélation déterminé entre les variables, l’on a seulement 5 chances sur 100 de se tromper.

Résultats

3.  Résultats

Trois principaux résultats sont obtenus. Il s’agit des différents types d’assainissement auxquels ont recours les ménages, les maladies diarrhéiques rencontrées selon le milieu de résidence ainsi que le lien entre types d’assainissement et maladies diarrhéiques.

3.1. Un fort Recours des ménages de la commune de Bongouanou à l’assainissement autonome traditionnel

Les résultats de l’enquête révèlent une primauté du système d’assainissement traditionnel auquel les ménages ont recours pour leurs besoins. Il s’agit des latrines qui ne permettent pas de traiter et d’éliminer les excréments (les déchets humains s’infiltrent directement dans le sol) et la défécation dans la nature. Quant à l’assainissement amélioré ou moderne (WC), à partir des fosses septiques, il est utilisé par 15,60% de ménages. Ces deux modes d’évacuation ou encore d’assainissement autonome sont différents du système moderne des grandes agglomérations qui conduisent les eaux usées directement dans les égouts, l’assainissement collectif. A l’échelle communale, l’assainissement autonome est diversement utilisé (Tableau n°2).

A l’analyse du tableau n°2, il ressort que 15,60% des ménages utilisent un assainissement amélioré. Dans cette catégorie, 8,57%  possèdent un WC avec chasse d’eau, 7,03% ont recours aux latrines avec fosses septiques sans chasse d’eau. Des disparités existent entre le milieu rural et urbain. En milieu urbain, 21,63% des ménages ont accès à un assainissement amélioré. Parmi ceux-ci, 12,65% sont favorables aux WC avec chasse d’eau et 8,98% usent les latrines avec fosse septique sans chasse d’eau. Dans les quartiers de Bongouanou, 51,43% des enquêtés de CEG fréquentent un WC avec chasse eau contre 6,66% à Agnikro et 5,71% dans chacun des quartiers de Dioulakro et Kangandissou. Dans le milieu rural en revanche, 3,81% de ménages seulement utilisent les WC avec chasses d’eau et 4,76% recourent aux latrines avec fosses septiques sans eau. Seuls les villages d’Akakro et d’Ahorosso utilisent des WC avec chasse d’eau, avec respectivement 17,14% et 5,71% des enquêtés. L’explication de ces écarts réside dans la capacité de chaque quartier à disposer continuellement de l’eau potable pour des services d’assainissement.
A l’inverse, les services non conformes, c’est-à-dire le recours à l’assainissement traditionnel, concernent 384 ménages de la commune de Bongouanou, soit 84,39% des enquêtés, dont 51,21% usent les puits perdus et 33,39% défèquent dans la nature. Dans cette classe, les ruraux occupent la première place. En effet, 91,42% des ruraux sont favorables à l’assainissement traditionnel, dont 39,52% utilisent des puits perdus et 51,90% défèquent dans la nature. Quant aux citadins, 78,37% fréquentent ces lieux d’aisance précaires dont 61,22% s’orientent vers les puits perdus et 17,14% dans la nature. Cependant, les réalités ne sont pas identiques au sein des différentes zones d’études. Au quartier CEG, aucun ménage enquêté n’a recours à la nature pour ses besoins. Tandis qu’à Dioulakro, Agnikro et Kangandisou, 82,86% des ménages défèquent à l’aide d’un système traditionnel : 80% à Dioulakro (dont 75% de puits perdus et 25% en plein air), 81,90% à Agnikro (dont 80,23% sans fausse septique contre 19,77% dans la nature) et 94,29% à Kangandissou (dont 66,67% de puits perdus contre 33,33% dans la nature).
En milieu rural également, il y a quelques nuances entre les villages. Hormis les 25,71% des ménages d’Akakro, 14,28% à Tanosso et 11,43% à Ahorosso, tous les ménages enquêtés de Broukro, de Bocassi et des campements affirment recourir à l’assainissement traditionnel basé sur des puits perdus et la défécation dans la nature. Respectivement, à Broukro il y’a  40% qui se mettent ‘à l’aise’ dans des puits perdus contre 60% dans la nature, à Bocassi 34,89% contre 65,71% et dans les campements 20% de puits perdus contre 80% dans la nature.

3.2. La morbidité diarrhéique dans la commune de Bongouanou : une expression hétéroclite

3.2.1. Inégale répartition des cas de morbidités diarrhéiques en milieu rural à Bongouanou
L’étude révèle une inégale répartition de cas de maladies diarrhéiques selon les villages.         Le tableau n°3 expose le nombre de cas déclarés et les effectifs réels de ménages qui présentent les signes de la maladie, soit trois selles moles/jour.
A l’analyse du tableau n°3, il ressort que 70,95% des enquêtés affirment être quotidiennement victimes de maladies diarrhéiques. Quant à ceux qui font au moins trois selles moles/jour, suite à un épisode diarrhéique (cas réels), ils représentent 56,67% de l’effectif total. Ces traits permettent de faire une analyse selon le degré d’exposition des ménages par village. En effet, en milieu rural, trois groupes de villages se distinguent quant à la contraction de la diarrhée.
Le premier groupe est constitué de villages au sein desquels moins de 50% des ménages présentent fréquemment des malades de la diarrhée. Il s’agit du seul village d’Akakro, dont 34,29% de la population enquêtée déclare être constamment sujet de la maladie. Dans ce village, seulement 28,57% présentent réellement les signes de diarrhée. Quant au deuxième groupe, il prend en compte les villages qui ont plus que 50% et moins que 70% des ménages qui présentent les signes de la maladie. Il est composé de 51,43% des ménages d’Ahorosso, 60% à Tanosso et 54,29% à Bocassi. Enfin, en milieu rural, le dernier groupe comptabilise les ménages dont la proportion de la morbidité diarrhéique est supérieure à 70%. Broukro et les campements se distinguent par ce niveau. A Broukro et dans les campements, respectivement 85,71% et 94,29% des ménages confirment être quotidiennement sujet aux affections diarrhéiques. Précisément 71,43% des ménages de Broukro et 77,14% dans des campements montrent les vrais signes de diarrhées. Ils font au moins trois selles moles/jour. Les variations significatives existent aussi chez les citadins.
3.2.2. Une répartition inégale de la morbidité diarrhéique en milieu urbain
Les citadins de Bongouanou présentent aussi des signes de la diarrhée (Tableau n°4).

L’analyse du tableau n°4 montre que 78,77% des citadins enquêtés confirment la fréquence de la maladie. Cependant, 67,75% font réellement la diarrhée, soit au moins trois selles moles/jour (cas réels). Tous les quartiers de la ville n’ont pas les mêmes proportions quant à l’exposition à cette pathologie.
En milieu urbain, deux types de répartition se dessinent. En effet, il  existe des quartiers à morbidité moins prononcée, c'est-à-dire un taux inférieur à 50% d’affection. C’est seulement le quartier CEG qui représente cette classe. Au CEG, 45,71% de ménages enquêtés  affirment être fréquemment sujet de diarrhée. Néanmoins, 34,29% font au moins trois selles/jour.           Le deuxième groupe de quartiers est constitué de plus de 62% de population régulièrement victimes de la diarrhée. Il s’agit des autres quartiers enquêtés, qui font de la ville de Bongouanou un espace très sensible à la maladie. Kangandissou totalise 62,86%, Dioulakro 72,86% et Agnikro 77,14% de cas réels.
La commune de Bongouanou présente un tableau sensible et diversifié quant à la répartition spatiale des sujets victimes de morbidités diarrhéiques. Ce caractère composite est relatif aux deux milieux de résidence.
3.3. Corrélation entre ménages ayant recours à l’assainissement traditionnel et expression des maladies diarrhéiques dans la commune de Bongouanou
3.3.1. De Forte corrélation croissante entre les maladies diarrhéiques et l’usage de l’assainissement traditionnel en milieu rural
L’enquête permet de confirmer des liaisons fortes entre le recours des ménages à l’assainissement traditionnel et les affections diarrhéiques. Les résultats sont consignés dans le tableau n°5.

Dans le milieu rural, il existe des corrélations significatives et positives entre les variables relatives à la morbidité diarrhéique et les sujets qui ont recours aux latrines traditionnelles pour leurs besoins. Ce lien est justifié par le coefficient de corrélation, qui est égal à 0,84. Il confirme que les ménages qui recourent aux lieux d’aisance traditionnels sont plus sensibles à la maladie diarrhéique. La méthode de régression linéaire, à travers le coefficient de détermination, démontre que cette relation est de forte intensité, soit 70%. Le tableau n°5 présente les statistiques des différents espaces. Dans le milieu rural, sur 91,42% de ménages qui fréquentent les latrines traditionnelles, 56,67% font régulièrement la maladie. En effet, 51,43% des ménages d’Ahorosso font fréquemment la diarrhée sur 88,57% qui utilisent les latrines traditionnelles. A Broukro, sur 100% des ménages qui ont recours au système d’assainissement traditionnels, 71,43% présentent les signes de la pathologie diarrhéique, notamment chez les enfants. La droite de régression linéaire permet d’expliquer cette corrélation de façon synthétique (Figure n°1).

L’allure de la droite de régression linéaire et le signe du coefficient directeur de l’équation de droite (0,516) donnent de confirmer cette forme croissante et significative de la corrélation entre les ménages qui recourent à l’assainissement autonome traditionnel et la population victime des affections diarrhéiques. La proportion de population qui ont recourt aux lieux d’aisance précaires évolue de pair avec les sujets  atteints de la diarrhée. Le coefficient de détermination R2 révèle bien l’existence d’une corrélation de forte intensité entre ces deux variables. Il indique que dans le milieu rural, 70,66% des cas de maladies diarrhéiques peuvent être expliqués par l’usage de l’assainissement traditionnel. En effet, l’équation de droite démontre que, si le recours à l’assainissement s’améliore de 0,70 unité,  la situation sanitaire de la population malade de la diarrhée évoluerait de 0,51 unité par rapport à la valeur constante qui est égale à 61,9. l existe aussi un rapport entre les deux variables dans le milieu urbain.
3.3.2. Forte corrélation croissante entre les maladies diarrhéiques et l’usage de l’assainissement traditionnel en milieu urbain
Le tableau n°6 présente l’existence d’une corrélation croissante et significative entre les ménages qui ont recours à l’assainissement autonome traditionnel et les affections diarrhéiques dans les quartiers de la ville de Bongouanou.

Le tableau n°6 révèle un lien significatif entre ces deux groupes de variables en milieu urbain. Celui-ci est prouvé par le coefficient de corrélation. Il est égal à 0,80. Ce qui veut dire que la proportion de ménages qui recourent aux lieux d’aisances sommaires évolue de pair avec les cas de fréquence des maladies diarrhéiques. Dans la ville de Bongouanou, 78,37% de ménages enquêtés utilisent ce type d’assainissement (puits perdus et recours à la nature) et 78,77% affirment être régulièrement victimes de morbidités diarrhéiques, dont 67,75% présentent les vrais signes (Tableaux n°4 et n°6). A Kangandissou, sur 94,29% des ménages qui utilisent les latrines traditionnelles, 62,86% font la maladie. A Dioulakro, sur 80% des ménages qui recourent aux latrines traditionnelles, 72,86% font fréquemment la diarrhée.       Le schéma le plus expressif est à Agnikro. Dans ce quartier, sur les 81,90% de sujets adoptifs de l’assainissement traditionnel, 77,14% déclarent faire régulièrement la maladie, soit un rapport supérieur à 0,94. La droite de régression linéaire permet d’expliquer de façon explicite cette corrélation (Figure n°2).

A l’analyse de la figure n°2, l’allure de la droite de régression linéaire et le signe du coefficient directeur de l’équation de droite donnent de soutenir cette forme croissante et significative de la corrélation qui existe entre les deux variables. Le coefficient de détermination R2 montre bien l’existence d’une corrélation d’intensité significative entre elles. Celui-ci révèle que dans les quartiers de Bongouanou, 64,71% des cas de diarrhées peuvent être justifiés par l’usage de l’assainissement traditionnel. L’équation de droite montre que, si le recours à l’assainissement s’améliore de 0,64 unité,  la situation sanitaire de la population malade de la diarrhée évoluerait de 0,80 unité par rapport à la valeur constante qui est égale à 26,03. Dans la commune de Bongouanou, la proportion de ménage qui utilise les lieux d’aisances sommaires est corrélée aux cas de malades de diarrhées. A l’échelle communale, à un taux de risque de 5%, le coefficient de corrélation R est égal à 0,97 et celui de la détermination R2 à 0,95.
Test de généralisation des résultats
L’étude est menée sur la base d’un échantillon et d’une méthode probabiliste. Pour généraliser les résultats au niveau de toute la population de la commune de Bongouanou (enquêtée comme non enquêtée), la méthode de Bravais-Pearson permet de faire un test. Ce test repose sur les deux hypothèses suivantes, menées à un taux de risque de 5% et un degré de liberté de 95% (Rcal = coefficient de corrélation calculé ; Rlu = coefficient de corrélation lu dans la table de Bravais-Pearson):
- H0, si IRcal I< IRlu I, alors la corrélation prouvée entre l’usage de l’assainissement traditionnel et les affections diarrhéiques reste au niveau de l’échantillon prélevé ; dans ce cas, l’étude ne peut être généralisée ;
- H1, si IRcal I > IRlu I, alors la corrélation prouvée entre l’usage de l’assainissement traditionnel et les affections diarrhéiques peut être généralisée à toute la population.
En application numérique, à ce taux de risque et ce degré de liberté, Rcal= 0,97 et Rlu = 0,5529, on peut conclure qu’il y’a une corrélation entre les ménages qui recourent à l’assainissement traditionnel et l’expression des affections diarrhéiques dans la commune de Bongouanou, car IRcal I> IRlu I.

Conclusion

Conclusion

L’assainissement traditionnel est source d’expression des affections diarrhéiques. L’analyse menée à Bongouanou a pu révéler un lien significatif entre les ménages qui recourent à ce type de lieu d’aisance et les maladies diarrhéiques. Qu’on soit en zone rurale ou en milieu urbain, la corrélation est croissante et significative entre ces deux composantes. A un taux de risque de 5% ou un degré de liberté de 95%,  cette vérité scientifique a été justifiée. A l’échelle communale, le coefficient de corrélation est égal à 0,97 avec une intensité de 0,95 tel que démontré par le coefficient de détermination. En milieu rural, la corrélation est de 0,84, dont 70% de cas de malade de diarrhée serait imputable à l’usage de l’assainissement traditionnel. Chez les urbains également, la corrélation est égale à 0,80 avec une intensité de 64% de relation. Cette proportion représente la part de maladies diarrhéiques qui est expliquée par le recours à l’assainissement traditionnel. Ces résultats confirment l’hypothèse selon laquelle le faible taux d’accès à l’assainissement moderne est source de la prévalence des maladies diarrhéiques à Bongouanou. Afin de réduire les risques liés aux affections diarrhéiques, les décideurs doivent  aider les ménages à accéder à l’assainissement moderne basé sur le système du tout-à-l’égout. Puis associer à ce service de base, l’eau potable et la culture de l’hygiène à  travers des actions de sensibilisation.

Références

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Publié

08 Juillet 2018

Comment citer

Revue Espace, Territoires, Sociétés et Santé ,[En ligne], 2018,, mis en ligne le 08 Juillet 2018. Consulté le . URL: https://www.retssa-ci.com/index.php?page=detail&k=27

Numéro

Rubrique

Espace,Sociétés et Santé